De passage en Écosse pour vanter la cause indépendantiste, Gilles Duceppe a été interpellé hier par trois étudiants québécois frustrés par la politique linguistique du Québec. L'homme de 63 ans présentait à l'Université d'Édimbourg une conférence à propos de la souveraineté du Québec devant une centaine de personnes dans une petite salle de cours.

Sa visite au nord du mur d'Hadrien aurait pourtant dû susciter plus d'intérêt: environ un tiers des Écossais veulent l'indépendance. Le parti séparatiste Scottish National Party a été élu en 2007 avec la promesse d'un référendum en 2010. Une option reportée après les prochaines législatives de mai 2011.

Or, au lieu de constitutionnalistes en herbe portant les couleurs du drapeau écossais, Gilles Duceppe a été mis au défi par des Québécois étudiant à l'Université d'Édimbourg.

Paris Gourtsoyannis, originaire de Montréal, a parti le bal. «Comment conciliez-vous votre désir d'une nation multiculturelle avec l'exode de milliers de Québécois d'origine écossaise et la loi qui restreint l'accès aux écoles anglaises aux anglophones?», a demandé le diplômé de 23 ans.

Le chef a rappelé que Montréal était la seule ville bilingue au Canada et qu'il était lui-même petit-fils d'un Londonien émigré au Québec.

L'anglais plus payant?

L'assistance a ri lorsque Charles-Alexandre Vennat, 21 ans, s'est levé, drapé de l'unifolié. «Je suis né de parents francophones et j'ai pu faire l'école anglaise juste avant que la loi 104 soit votée. Pourquoi enlevez-vous la chance aux Québécois francophones d'être parfaitement bilingues et d'étudier à l'étranger?»

Son ami Sonny Morz, vêtu d'un chandail du Canadien, a renchéri: «Après tout, l'anglais est la langue nationale au Canada comme aux États-Unis. Ce ne serait pas plus payant pour la province si les gens étaient éduqués dans la langue de leur choix?»

Gilles Duceppe a répondu qu'il était normal que les écoles publiques d'une nation francophone le soient aussi. «N'oublions pas que les Québécois peuvent aller dans des cégeps et des universités anglophones subventionnés par la province», a-t-il rappelé.

«Je suis furieux à l'idée que mes enfants ne pourront pas aller à l'école anglaise parce que je suis allé à l'école primaire francophone», a expliqué plus tard Sonny Morz à La Presse.

Voyage à ses frais

Le chef du Bloc québécois avait rencontré plus tôt la ministre écossaise de la Culture et des Affaires étrangères, Fiona Hyslop, qui lui a posé quelques questions sur les référendums québécois. «Nous n'avons pas de leçons à donner au Scottish National Party, a-t-il insisté. On apprendra les uns des autres.»

Face à la rumeur, qui a démarré dans le courrier des lecteurs du National Post à Toronto, selon laquelle il voyagerait en Europe aux frais des contribuables canadiens, Gilles Duceppe est catégorique. «Mon séjour est entièrement payé par le parti», a-t-il dit avant de partir pour l'aéroport Heathrow.