Le gouvernement américain a subi hier un revers important lorsqu'un jury new-yorkais a déclaré le Tanzanien Ahmed Ghailani coupable d'un seul chef d'accusation sur les 286 qui pesaient contre lui pour les attentats contre les ambassades des États-Unis de Nairobi, au Kenya, et de Dar es Salaam, en Tanzanie, qui avaient fait 224 morts en 1998.

Capturé au Pakistan en 2004, Ghailani était le premier détenu de Guantánamo à avoir été transféré aux États-Unis pour y être jugé devant un tribunal de droit commun. Son cas devait servir d'exemple de la capacité de la justice civile américaine à juger les suspects de terrorisme, y compris le cerveau présumé des attentats terroristes du 11 septembre, Khaled Cheikh Mohammed.

Âgé de 36 ans, Ghailani a été reconnu coupable de «complot pour détruire des biens américains». Il sera condamné le 25 janvier à une peine allant de 20 ans de prison minimum à la prison à vie, selon l'avocat du gouvernement.

Ghailani a été acquitté de «complot pour tuer des Américains», «complot en vue d'utiliser des armes de destruction massive», «pose de bombes dans des ambassades» et «meurtres», entre autres chefs d'accusation.

Le jury de six hommes et six femmes a rendu son verdict au cinquième jour de ses délibérations. Au début d'un procès de quatre semaines, le procureur du gouvernement avait promis d'établir par preuves indirectes que Ghailani avait un joué un rôle-clé dans la préparation de l'attentat en Tanzanie.

«Nous allons prouver que les massacres perpétrés en Afrique de l'Est étaient l'oeuvre d'une cellule d'Al-Qaïda et que cet homme, Ahmed Ghailani, était un membre essentiel de cette cellule», avait déclaré le procureur Nicholas Lewin.

Selon la poursuite, Ghailani a acheté le camion Nissan Atlas utilisé pour transporter la bombe et les bombonnes de gaz qui devaient servir à intensifier la force de l'explosion à Dar es Saalam. Toujours selon le gouvernement américain, il a également gardé dans une armoire le détonateur utilisé lors de l'attentat et mis son téléphone cellulaire à la disposition de complices dans les semaines qui ont précédé l'attaque.

Les avocats de la défense ont décrit Ghailani comme un jeune homme qui s'était fait duper par des gens plus âgés que lui.

Recours à la torture

Les procureurs fédéraux ont fait face à plusieurs obstacles au cours du procès. Le juge Lewis Kaplan leur a notamment interdit d'appeler à la barre leur témoin principal en raison des techniques d'interrogatoire confinant à la torture que les agents de la CIA ont utilisées pour le faire parler. Ce témoin devait révéler qu'il avait vendu à Ghailani une importante quantité de TNT utilisée pour faire exploser l'ambassade américaine à Dar es Salaam.

Les procureurs fédéraux ont également choisi de ne pas présenter les déclarations faites par Ghailani lors de sa détention dans une prison de la CIA et plus tard à Guantánamo. Selon les avocats de la défense, les «aveux» du suspect ont été obtenus sous la torture.

Il y a un an, le ministère de la Justice américain a annoncé son intention de transférer le dossier de Khalid Cheikh Mohammed, cerveau des attentats du 11 septembre 2001, devant un tribunal fédéral de New York, soulevant un tollé. Un tel scénario semble aujourd'hui inimaginable.