Portés par le vent de révolte qui souffle dans le monde arabe, des milliers de Britanniques prendront part à la plus grande démonstration dans la capitale depuis l'invasion de l'Irak en 2003. La Grande-Bretagne est-elle à l'aube d'un nouveau Mai 68?

Plus de 100 000 Britanniques convergeront vers la capitale aujourd'hui pour protester contre les mesures d'austérité du gouvernement de David Cameron, qui seront appliquées dès la semaine prochaine.

Preuve de sa mouvance internationale, le «printemps arabe» se transportera jusqu'au pied de la statue de l'amiral Nelson lorsque des milliers de manifestants «transformeront Trafalgar Square en square Tahrir», la place publique au Caire qui fut le centre nerveux de la révolution égyptienne en février.

Dans les universités de Londres, des affiches invitent les étudiants à «marcher comme un Égyptien» (Walk like an Egyptian).

«Nous voulons créer un centre de commande continu comme nous avons vu dans les manifestations au Moyen-Orient et en Afrique du Nord», a expliqué un des organisateurs de l'occupation de Trafalgar Square, Michael Chessum, de la National Campaign Against Fees and Cuts.

Non aux coupes

Leurs revendications seront toutefois différentes de leurs inspirateurs arabes. Le mouvement de protestation mis sur pied par les syndicats demande au gouvernement Cameron de faire volte-face sur les coupes budgétaires de 150 milliards de dollars annoncées pour les cinq prochaines années.

Étudiants, professionnels de la santé, retraités, chômeurs et syndiqués prendront part à la «Marche pour l'alternative: Emplois, Croissance, Justice», qui se tiendra principalement à Hyde Park. Ils dénonceront une myriade de mesures: privatisation en douce du système de santé, hausse des droits de scolarité, coupes dans les services sociaux, refonte du système de retraite et mises à pied dans le secteur public.

Malgré l'ambiance «familiale» promise par le principal syndicat du pays, Trades Union Congress, qui représente 6,2 millions de travailleurs, des éléments radicaux pourraient gâcher la fête.

Un groupe de désobéissance civile, UK Uncut, tentera d'occuper des immeubles et de provoquer la fermeture de dizaines de magasins. Des manifestants contre l'offensive militaire en Libye seront aussi du nombre.

Près de 5000 policiers seront sur le pied d'alerte.

Un parfum de Mai 68 est dans l'air, croit Robin Archer, professeur en sociologie à la London School of Economics. «Comme à l'époque, les étudiants et les travailleurs sèment en ce moment les révoltes dans plusieurs pays, dit à La Presse l'expert qui manifestera également aujourd'hui. Les mesures proposées par le gouvernement britannique sont si radicales que des grèves en rafales sont inévitables.»