Deux personnes ont été tuées par balles et des dizaines blessées lundi lors de nouvelles importantes manifestations contre le régime au Yémen où l'opposition a donné son accord «final» au plan de sortie de crise du Golfe.

Les protestataires ont manifesté dans plusieurs villes pour réclamer le départ de M. Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, et réaffirmer leur rejet du plan de sortie de crise du Conseil de coopération du Golfe (CCG), accepté par le parti présidentiel, puis par l'opposition parlementaire.

«Nous avons donné notre accord final au plan du CCG après avoir obtenu des assurances des frères du Golfe et des amis américain et européens au sujet de nos objections sur certaines clauses du plan», a déclaré le porte-parole de l'opposition, Mohamed Qahtane.

Intervenant pour disperser une manifestation dans la ville d'Ibb, au sud de Sanaa, «les forces de sécurité ont tué un protestataire et blessé 30, dont huit par balles», a indiqué à l'AFP une source médicale.

A Al-Baïdah, au sud-est de la capitale, «des hommes armés appartenant au parti au pouvoir ont tiré contre un sit-in de protestation, tuant un manifestant avant de prendre la fuite», a rapporté un témoin.

A Taëz, plus au sud-ouest, 50 manifestants ont été blessés, dont 25 par balles, et plus de 200 ont souffert de problèmes respiratoires lorsque les forces de sécurité et des civils armés ont ouvert le feu et lancé des grenades lacrymogènes pour disperser une manifestation, selon des protestataires.

Des manifestations ont également eu lieu à Hodeïda, sur la mer Rouge, et à Moukalla (sud-est).

A Hodeïda, une unité de la Garde républicaine, dirigée par un fils du chef de l'Etat, encerclait depuis dimanche la base aérienne commandée par Ahmed Sanhani, un officier qui a rejoint le mouvement de contestation, selon des habitants.

«Pas de répit, pas de répit tant que le bourreau n'a pas été jugé», ont répété les manifestants à Taëz où les forces de sécurité avaient barré avec des blocs en ciment les principales artères conduisant au siège du gouverneur. Des véhicules blindés de l'armée y étaient déployés.

Déchaînés, des protestataires ont arraché des portraits de M. Saleh, dans une campagne destinée à «nettoyer la ville des photos du président», qui trônent sur les grandes places et les édifices publics.

Les protestataires ont répété leur rejet de l'initiative du CCG prévoyant le départ du chef de l'Etat, dans quelques semaines, et son immunité.

Malgré l'acceptation par son parti du plan du CCG, M. Saleh a répété dimanche sur la BBC qu'un changement de régime passerait par «les urnes».

Le plan élaboré par les pays du CCG, inquiets de la crise yéménite qui dure depuis fin janvier et a fait plus de 130 morts selon des sources médicales, prévoit que M. Saleh chargerait l'opposition de former un gouvernement de réconciliation nationale.

30 jours après la mise en application de l'accord, M. Saleh démissionnerait après l'approbation par la Chambre des députés d'une loi lui accordant l'immunité.

«Le plan ne prévoit pas une suspension des sit-in de protestation, lesquels sont un droit constitutionnel des Yéménites», a par ailleurs déclaré à l'AFP un autre responsable du Front commun, Hamid al-Ahmar.

Les Etats-Unis, qui ont suivi de près la médiation du CCG, «nous ont fait savoir dimanche par la voix de leur ambassadeur à Sanaa qu'il n'y avait aucun lien entre une suspension des sit-in et un accord» sur un règlement politique, a indiqué Soltane al-Atwani, membre de la direction de cette opposition.

La Grande-Bretagne a mis en garde contre une escalade des «graves défis économiques, sociaux et sécuritaires» si la transition du pouvoir de M. Saleh ne s'effectue pas «aussi rapidement que possible».