Le bateau était plein à craquer. Environ 600 migrants africains s'entassaient à son bord. Le rafiot n'a pas tenu le coup. À peine avait-il quitté le port de Tripoli, vendredi matin, qu'il a chaviré. La plupart des passagers, prisonniers de la cale, ont péri dans la Méditerranée.

Les rares survivants qui ont réussi à atteindre la côte à la nage n'étaient pas au bout de leurs peines. Selon plusieurs témoignages, les hommes de Mouammar Kadhafi les ont forcés à embarquer dans un autre bateau.

«Poussés à bord»

«Certains avaient très peur d'embarquer après le naufrage. Ils ont été regroupés et littéralement poussés à bord», dit Sybella Wilkes, porte-parole du Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies.

Ce serait la nouvelle arme du colonel Kadhafi. Après avoir longtemps empêché les départs clandestins des côtes libyennes, il pousserait maintenant les migrants africains à l'exode afin d'embarrasser les pays d'Europe - France et Italie en tête - qui lui ont déclaré la guerre.

«Ce week-end seulement, près de 2400 personnes ont quitté Tripoli à bord de 5 bateaux. Le gouvernement, qui contrôle le port, doit nécessairement être au courant», dit Mme Wilkes.

Depuis le début du conflit en Libye, 35 bateaux transportant 12 360 réfugiés ont atteint l'Italie et Malte. La majorité des passagers étaient des migrants d'origine subsaharienne qui fuyaient les violences en Libye.

Entassés dans des bateaux de pêche rouillés, plusieurs sont carrément envoyés à la mort, selon Mme Wilkes. «En plus des 600 victimes de vendredi, 800 personnes qui ont tenté la traversée à partir de la Libye sont aujourd'hui portées disparues.»