L'Union européenne a durci encore lundi ses sanctions contre la Syrie et demandée à l'ONU d'aider les civils victimes de la répression, accentuant ainsi la pression sur le régime de Bachar al-Assad au moment où il est suspendu par la Ligue arabe.

Le chef de la diplomatie française Alain Juppé a justifié la nécessité d'une sévérité accrue par «l'entêtement sanguinaire du régime de Damas».

Lors d'une réunion à Bruxelles, les ministres européens des Affaires étrangères ont ainsi étendu leurs sanctions contre le régime syrien à 18 personnes, essentiellement des militaires, visés désormais par des gels d'avoirs en Europe et des interdictions de voyager sur le continent, a indiqué à l'AFP une source diplomatique.

Ils ont aussi décidé de geler des prêts européens dans le pays en raison de la poursuite de la répression.

Cela concerne dans le détail des crédits de la Banque européenne d'investissement (BEI) ainsi qu'une assistance technique prévue dans ce domaine.

La BEI a accordé entre 1978 et 2010 plus de 1,7 milliard d'euros de prêts à la Syrie, dont plus de la moitié dans le secteur de l'énergie. Elle a été dotée pour la période 2007-2013 d'une enveloppe de plus de 10,7 milliards d'euros pour des projets dans neuf pays méditerranéens, dont la Syrie.

L'UE avait déjà sanctionné au cours des derniers mois 56 personnes jugées responsables de la répression et gelé les avoirs de 19 organisations ou entreprises soupçonnées de soutenir le pouvoir en place, y compris la Commercial Bank of Syria.

L'Europe a enfin décrété un embargo sur les armes à l'encontre du pays, interdit l'importation de produits pétroliers, banni tous les investissements et prêts dans des nouveaux projets pétroliers en Syrie et enfin stoppé la fourniture de billets de banque à la banque centrale.

Les nouvelles mesures surviennent peu après la décision de la Ligue arabe de suspendre la Syrie de ses instances à compter du 16 novembre pour ne pas avoir mis en oeuvre un plan d'apaisement qu'elle avait mis au point pour le pays.

Ce plan prévoyait notamment le retrait des forces armées des villes où le mouvement de contestation est actif et la libération des manifestants arrêtés depuis le début des violences, qui ont fait plus de 3500 morts selon un bilan de l'ONU.

La Ligue arabe a aussi commencé à étudier «la mise en place d'un mécanisme pour protéger les civils en Syrie».

Alain Juppé a saisi la balle au bond lundi en appelant l'ONU à trouver un moyen de «protéger davantage» les populations civiles dans le pays.

«Aujourd'hui le moment est venu de voir comment nous pouvons protéger davantage les populations. J'espère que le Conseil de sécurité aussi finira par prendre position», a-t-il déclaré à la presse à Bruxelles en marge de la réunion.

Mais à ce jour la Russie, alliée de longue date de la Syrie, s'oppose, de même que la Chine, à toute résolution au Conseil de sécurité de l'ONU condamnant la répression dans le pays. Et a fortiori un texte envisageant une initiative extérieure quelconque pour protéger les populations civiles.

Le ministre suédois des Affaires étrangères Carl Bildt a estimé «qu'une possibilité pour protéger les civils serait d'envoyer des observateurs, peut-être une mission humanitaire de l'ONU».

Problème là encore: si une telle mission humanitaire ne nécessiterait pas l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU, elle aurait en revanche besoin de celui de Damas.

La chef de la diplomatie de l'UE Catherine Ashton a en tout cas exclu à ce stade une intervention militaire comme celle qui s'est déroulée en Libye. «Je ne pense pas que cela prenne la même direction, qu'on soit dans la même situation», a-t-elle dit.