Les bombardements intenses lancés samedi par les forces de la coalition internationale contre les forces du leader libyen Mouammar Kadhafi, qui a menacé de riposter contre tout objectif civil ou militaire en Méditerranée, ont cessé dimanche matin.

Au lever du jour, les bombardements avaient cessé dans Tripoli et ses alentours, a constaté un journaliste de l'AFP.

Dans Benghazi, le bastion des rebelles dans l'est de la Libye, les bombardements avaient également cessé et la deuxième ville du pays était calme, ont constaté des journalistes de l'AFP. Des habitants ayant fui la ville samedi commençaient à revenir.

Les magasins restaient fermés, mais de petits vendeurs installés sur les trottoirs proposaient fruits et légumes.

Après des semaines d'hésitations, un mandat de l'ONU et un appui arabe, la  coalition avec à sa tête les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne, est passée samedi à l'offensive en bombardant par air et par mer des objectifs militaires libyens pour tenter de stopper la répression de la révolte lancée le 15 février contre le régime du colonel Kadhafi.

L'intervention militaire était souhaitée par l'opposition libyenne, surtout depuis la prise de contrôle ces derniers jours par les forces gouvernementales de plusieurs bastions rebelles à coups d'attaques aériennes et de roquettes.

Washington et Londres ont lancé plus de 110 missiles de croisière Tomahawk à partir de navires et sous-marins à partir de samedi à 19H00 GMT contre plus de 20 objectifs, dont des systèmes de défense antiaérienne et des noeuds de communication stratégiques, tous sur la côte méditerranéenne.

L'intervention, coordonnée d'un QG américain à Stuttgart (Allemagne) et appelée par le Pentagone «Odyssey Dawn» (Aube de l'Odyssée), a débuté par une frappe aérienne française contre un véhicule des forces pro-Kadhafi à 16H45 GMT, le premier tir après le feu vert jeudi de l'ONU au recours à la force pour protéger la population civile.

Des chasseurs bombardiers britanniques Tornado ont également participé aux raids tirant des missiles de croisière Stormshadow.

Selon un bilan provisoire de source officielle libyenne, 48 personnes ont trouvé la mort et 150 ont été blessées dans ces attaques, dont 26 à Tripoli.

Dimanche vers 00H30 GMT, un bombardement aérien a visé Tripoli et la défense antiaérienne déployée dans la capitale, notamment dans la résidence-caserne du dirigeant libyen à Bab al-Aziziya, est entrée en action, selon un journaliste de l'AFP.

Un avion a survolé le secteur, mais aucune indication n'a pu être obtenue dans l'immédiat sur les cibles visées. Les tirs, entendus pendant environ 40 min, ont été intenses pendant un quart d'heure puis plus sporadiques, avant de cesser à l'aube.

Auparavant, les autorités libyennes avaient fait état «d'objectifs civils et militaires» touchés et de «graves dégâts matériels» à Misrata, à l'est de Tripoli, ainsi qu'à Zouara (ouest), Syrte (est), la ville natale de Kadhafi, et Benghazi, bastion rebelle dans l'Est.

Dans un court enregistrement sonore diffusé par la télévision officielle après le début des opérations, le numéro un libyen a déclaré que la mer Méditerranée était devenue un «champ de bataille» et affirmé que les «dépôts d'armes» étaient ouverts pour défendre la Libye.

Il a juré de s'attaquer à «tout objectif civil ou militaire» en Méditerranée. «Les intérêts des pays ayant participé à l'agression seront en danger», a-t-il prévenu.

L'équipage d'un remorqueur italien, composé de huit Italiens, deux Indiens et un Ukrainien, est retenu depuis samedi dans le port de Tripoli par des hommes armés, alors que le navire était en train de débarquer à Tripoli des travailleurs libyens, selon l'agence Ansa.

L'opération internationale a été en revanche saluée par des tirs de joie et des coups de klaxon à Al-Marj, à une centaine de km au nord-est de Benghazi, épicentre de l'insurrection à un millier de km à l'est de Tripoli.

«L'usage de la force n'était pas l'option qui avait notre préférence», a déclaré le président américain Barack Obama. «Mais nous ne pouvons pas rester les bras ballants quand un tyran dit à son peuple qu'il sera sans pitié».

Néanmoins, M. Obama a annoncé avoir autorisé «une action militaire limitée en Libye» réaffirmant que les États-Unis ne déploieraient pas de troupes au sol.

La Russie et la Chine, qui s'étaient abstenues lors du vote de la résolution à l'ONU, ont regretté l'intervention, le Japon apportant en revanche son soutien à l'attaque. Le comité de l'Union africaine sur la Libye a appelé à «la cessation immédiate des hostilités».

La résolution 1973 de l'ONU exige l'arrêt complet des attaques contre des civils, impose une zone d'exclusion aérienne en Libye et permet des frappes pour contraindre les pro-Kadhafi à cesser la répression qui a fait des centaines de morts et poussé 300 000 personnes à fuir le pays depuis le 15 février.

Mais le régime libyen la considère comme «nulle» après les frappes occidentales, estimant avoir de nouveau «le droit d'utiliser son aviation civile et militaire pour se défendre». Il a réclamé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU.

Alors que l'opération militaire semblait imminente samedi, les forces de M. Kadhafi avaient attaqué Benghazi dès l'aube. Elles avaient tiré à l'arme lourde contre des quartiers résidentiels, selon des témoins.

La Croix rouge internationale a mis en garde contre les risques encourus par les civils, et appelé toutes les parties à se conformer rigoureusement au droit international humanitaire.

Enfin, la chaîne de télévision du Qatar Al-Jazira a affirmé que quatre de ses journalistes, dont un Norvégien et un Britannique, étaient détenus par les autorités à Tripoli.