Le pape Benoît XVI a demandé pardon à Dieu et aux victimes des prêtres pédophiles, hier, durant l'homélie du vendredi à la basilique Saint-Pierre. La messe, à laquelle ont assisté 15 000 prêtres des quatre coins du monde, a aussi été l'occasion pour Benoît XVI d'assurer que «tout ce qui est possible sera fait pour que de tels sévices ne se reproduisent plus jamais».

Le pape avait déjà présenté des excuses semblables dans une lettre aux évêques irlandais et durant sa visite au Portugal - mais jamais à Saint-Pierre de Rome. «C'est très important aux yeux du pape», souligne Gilles Routhier, théologien à l'Université Laval, en entrevue de l'Italie où il assiste à un congrès sur la réception du concile Vatican II. «En 2000, quand Jean-Paul II avait envisagé de demander pardon durant le jubilé à Rome, Joseph Ratzinger (nom de baptême de Benoît XVI) s'y était opposé, sans succès. Demander pardon à Saint-Pierre, c'est plus fort.»

De l'action

France Bédard, fondatrice de l'Association des victimes de prêtres du Québec, estime qu'il s'agit d'un «bon premier pas». «Mais il faut aussi de l'action, dit Mme Bédard. Il faut indemniser les victimes, les aider à obtenir de la thérapie. Et il faut chasser de la prêtrise les pédophiles.»

D'autres institutions ont-elles des modèles d'indemnisation et d'aide aux victimes dont l'Église pourrait s'inspirer? «Je ne sais pas, dit Mme Bédard. Mais c'est clair que ça ne doit pas venir de l'État.»

Les promesses du pape d'être plus sévère envers les prêtres pédophiles - le responsable de la justice à la Congrégation pour la doctrine de la foi a même évoqué une «chirurgie divine» pour couper tout lien avec les prêtres pédophiles - sont-elles satisfaisantes? «Je ne vois pas encore les résultats, déplore Mme Bédard. Dans les causes impliquant d'anciens élèves du collège Notre-Dame à Montréal et du séminaire Saint-Alphonse, à Sainte-Anne-de-Beaupré, l'Église traîne les pieds. Elle ne veut pas qu'on touche à ses milliards. Elle veut conserver sa couronne d'or.»

Benoît XVI a aussi affirmé hier que l'Église évaluerait mieux l'«authenticité de la vocation» des futurs prêtres, malgré le manque de prêtres, et les accompagnerait mieux par la suite - jeudi soir, dans une autre intervention publique, il a conseillé aux prêtres de «prendre le temps de se reposer». L'organisme américain Survivors Network of Those Abused by Priests a indiqué par voie de communiqué que ce n'était pas suffisant, parce qu'il fallait aussi limiter le pouvoir des évêques de déplacer des prêtres d'une paroisse à une autre.

Pour marquer ces excuses à Saint-Pierre, l'Osservatore romano a publié un éditorial optimiste malgré «l'ombre sur la crédibilité de l'Église» qu'ont jetée les scandales de pédophilie. «Certains parlent d'une annus horribilis, mais en réalité, c'est une année de grâce. Les germes du renouveau intérieur des prêtres ont été plantés.»

L'année des prêtres

L'homélie d'hier a marqué la fin de l'Année internationale des prêtres, lancée pour honorer le 150e anniversaire de la mort de saint Jean-Vianney, patron des prêtres. Jeudi soir, dans le cadre des célébrations, le pape a rencontré 10 000 prêtres de 90 pays sur la place Saint-Pierre. Selon le National Catholic Reporter, le souverain pontife a défendu le célibat des prêtres en affirmant qu'il s'agissait d'une anticipation «eschatologique» de l'au-delà, où les liens du mariage n'existent plus et où chaque homme est directement en relation avec le Christ. Le groupe international Ordain Catholic Women a perturbé les célébrations en tenant mardi une manifestation en faveur de l'ordination des femmes.