Confronté à l'immense défi des pires émeutes depuis des décennies au Royaume-Uni, le Premier ministre David Cameron a encore haussé le ton mercredi, assurant à une opinion de plus en plus inquiète que la «riposte était en cours» et complétant l'arsenal répressif.

Aucun nouvel incident n'avait été signalé mercredi à la tombée de la nuit dans le pays touché depuis samedi par des violences qui ont déjà fait au moins un mort et un blessé grave.

A Birmingham, trois personnes d'une même famille, qui tentaient de protéger leur quartier des pilleurs, ont été écrasées dans la nuit de mardi à mercredi par une voiture dans des circonstances encore confuses. La police a ouvert une enquête pour meurtre, sans préciser toutefois si ces décès étaient directement liés aux émeutes.

David Cameron s'est rendu sur place pour présenter ses condoléances à la famille et a qualifié l'incident d'«horrible».

Un homme agressé par un groupe de jeunes alors qu'il essayait d'éteindre un incendie à Ealing, un quartier de l'ouest de Londres, dans la nuit de lundi à mardi, se trouvait dans un état grave.

Vingt-quatre heures après une première mise en garde aux fauteurs de troubles, David Cameron, soucieux de faire oublier son absence pour cause de vacances au début des incidents, est revenu à la charge, promettant qu'il ne laisserait pas une «culture de la peur s'instaurer dans les rues».

Les policiers seront autorisés à utiliser «toute tactique qu'ils jugent nécessaire», a averti le chef du gouvernement, notamment des canons à eau, jusqu'à présent réservés aux troubles en Irlande du Nord.

«Il fallait une riposte et la riposte est en cours», a poursuivi sur un ton très offensif le Premier ministre conservateur depuis le perron de Downing Street, faisant fi des inquiétudes «bidons concernant les droits de l'Homme» après la publication par la police de photos de pilleurs présumés.

Plus d'un millier de personnes au total ont été arrêtées dans le pays depuis samedi et deux émeutiers ont été condamnés à de la prison pour leur rôle dans les pillages et violences de Manchester (nord-ouest), l'un à 16 semaines de prison, l'autre à 10 semaines. Il s'agit des deux premières personnes emprisonnées depuis le début des émeutes.

M. Cameron s'est aussi félicité que le déploiement massif de 16 000 policiers à Londres ait épargné à la capitale une quatrième nuit d'émeutes, malgré la tension toujours perceptible.

La nuit de mardi à mercredi avait en revanche été le théâtre de violences et de pillages dans plusieurs autres villes, atteignant pour la première fois Manchester (nord-ouest), la troisième ville du pays, ainsi que Nottingham, Birmingham (centre) et sa banlieue, Liverpool, Salford (nord-ouest), Bristol et Gloucester (sud-ouest).

Compliquant un peu plus la situation, des centaines d'habitants ont constitué des groupes d'autodéfense à Londres. A Southall (ouest), par exemple, des membres de la communauté Sikh se mobilisaient pour protéger leurs temples des pillages.

Ces émeutes, les plus graves dans le pays depuis plus de vingt ans, constituent sans doute la pire crise à laquelle doit faire face David Cameron en quinze mois de pouvoir.

Déjà en position très délicate au début de l'été à cause du scandale des écoutes et de ses liens avec le groupe de presse de Rupert Murdoch, il a été vivement critiqué pour n'avoir écourté que mardi ses vacances alors que les émeutes faisaient rage depuis trois jours.

Et dans les villes saccagées par les pilleurs, des habitants se plaignent que le gouvernement ne parvienne pas à reprendre la situation en main. Les jeunes émeutiers, très mobiles, communiquent via la messagerie gratuite de leur BlackBerry.

«Le fait que des gens se livrent à des pillages dans différents points du pays et de la capitale au même moment est une situation nouvelle et un vrai défi», a plaidé M. Cameron qui doit s'adresser jeudi au parlement convoqué en session extraordinaire.

L'opposition se garde pour l'instant de jeter de l'huile sur le feu et condamne sans ambiguïtés les violences. Certains travaillistes commencent toutefois à dire tout haut que le plan de rigueur du gouvernement a contribué à faire monter la tension sociale.

Le maire de Londres, le conservateur Boris Johnson, a lui-même lancé un appel au gouvernement pour qu'il reconsidère les baisses d'effectifs dans la police.

«Le plus grand test pour Cameron est arrivé. Est-il à la hauteur de la tâche?», s'interrogeait mercredi le quotidien The Independent.