La Ville de Westmount reconnaît avoir commis une «erreur» en mettant aux enchères la luxueuse résidence de Sakher el-Materi, gendre du président déchu de la Tunisie, Zine el-Abidine Ben Ali.

Au début du mois de décembre, la Ville a publié un avis public dans l'espoir de vendre la propriété de 2,5 millions de dollars accrochée au flanc du mont Royal. Sakher el-Materi l'avait payée comptant en 2008.

Le gendre milliardaire avait toutefois omis de payer les taxes municipales. Sa dette envers la Ville de Westmount s'élevait à 16 000$, d'où la mise aux enchères, qui était prévue pour le 18 janvier.

Mais un officier de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) s'est rendu à l'hôtel de ville de Westmount, mercredi, pour rappeler aux responsables municipaux qu'ils commettraient une infraction en vendant la propriété.

En effet, Sakher el-Materi est visé par la Loi sur le blocage des biens des dirigeants étrangers corrompus, adoptée en mars. Tous ses avoirs au Canada sont gelés, pour être éventuellement restitués à la Tunisie.

En vertu de la nouvelle loi, toute transaction touchant les avoirs de Sakher el-Materi sont proscrites. Ceux qui l'enfreignent risquent jusqu'à cinq ans de prison.

«C'est vraiment une erreur de notre part. On a enlevé la maison de notre liste de propriétés à vendre pour non-paiement de taxes. On respecte ce que la loi fédérale nous impose», explique Duncan Campbell, directeur général de la Ville de Westmount.

Lourdes dettes, fuite au Qatar

Sakher el-Materi s'est réfugié au Qatar avec sa famille après la chute du régime de son beau-père, provoquée par la révolte populaire en Tunisie.

Le 28 juillet, la justice tunisienne l'a condamné par contumace à 16 ans de prison pour corruption et détournement de biens publics.

Au Canada, il n'y a pas que la Ville de Westmount qui le pourchasse. Il n'a jamais payé les taxes scolaires (6000$) ni les factures de Gaz Métro (2000$), pas plus que des travaux de rénovation de 1,1 million à sa résidence, laissant un petit entrepreneur endetté jusqu'au cou.

Un an après le début de la révolution du jasmin, l'étau canadien se resserre autour des membres du clan Ben Ali. Le 6 décembre, la GRC a fait une perquisition au bureau de Westmount de l'avocat Donald Kattan, soupçonné d'être l'homme de main au Canada de Belhassen Trabelsi, beau-frère du président déchu.