Le premier ministre Stephen Harper s'est porté à la défense de l'ambassadeur du Canada en Afghanistan cité dans un câble obtenu par WikiLeaks, jeudi, tandis que le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, a demandé à la GRC d'enquêter sur une fuite au sein de son ministère à propos du même ambassadeur.

Cette dernière fuite concerne une note diplomatique qu'ont obtenue le National Post et le Globe and Mail dans laquelle l'ambassadeur du Canada en Afghanistan, William Crosbie, a suggéré à Ottawa de le rappeler, de crainte que des propos qui lui sont attribués, susceptibles d'être rendus publics par WikiLeaks, ne nuisent aux relations entre les deux pays.

Ces propos ont finalement été diffusés jeudi soir sur le site web du Guardian. Au cours d'une discussion avec son homologue américain, en février dernier, l'ambassadeur du Canada aurait exprimé une piètre confiance à l'endroit du président afghan Hamid Karzaï.

«Il (William Crosbie) était émotif et disait que (la question des élections afghanes) lui faisait bouillir le sang», a relaté Karl Eikenburry dans le câble.

«Il a décrit la position canadienne selon laquelle la communauté internationale devait se tenir debout au nom de la majorité silencieuse ou être blâmée pour avoir laissé Karzaï et sa famille établir dans tout le pays le même système de favoritisme qui existe à Kandahar», a-t-il ajouté.

Une série de câbles qui émanent de l'ambassade des États-Unis en Afghanistan (voir autre texte) ont été diffusés simultanément jeudi par quelques médias internationaux.

Jeudi, l'ambassadeur de l'Afghanistan au Canada, Jawed Ludin, s'est montré laconique. «Il (M. Crosbie) devrait prendre la responsabilité de ce qu'il a dit, peu importe ce que ça implique», a-t-il déclaré en entrevue à CTV.

«Personne ne devrait permettre à ces commentaires de nuire aux relations entre nos deux pays», a-t-il souligné.

Pour sa part, le premier ministre Stephen Harper a défendu son ambassadeur. «Je n'ai pas vu tous les commentaires, a-t-il dit. Mais la responsabilité première des ambassadeurs et hauts-commissaires du Canada est de représenter le Canada (...) et non l'Afghanistan.»

Il a par ailleurs rappelé que son gouvernement avait déjà exprimé franchement ses préoccupations au sujet de la politique afghane et qu'il allait continuer à le faire.

La pointe de l'iceberg

De tels remous diplomatiques pourraient n'être que la pointe de l'iceberg, si l'on en juge par les paroles de Karl Eikenburry que William Crosbie a rapportées dans la note qui pourrait faire l'objet d'une enquête de la GRC.

Hamid Karzaï «a commencé à couper les ponts avec nous et cela (les fuites de WikiLeaks) pourrait le pousser à faire de même avec l'ensemble de la coalition», aurait déclaré l'ambassadeur des États-Unis lors d'une récente rencontre entre les deux diplomates.

L'organisme WikiLeaks a commencé à rendre publics dimanche environ 250 000 câbles diplomatiques américains, dont quelque 2500 proviendraient du Canada. Jusqu'ici, seuls cinq câbles émanant de l'ambassade des États-Unis à Ottawa ont été publiés.