Julian Assange avait perdu son demi-sourire habituel hier à la sortie du tribunal de Belmarsh, dans le sud de Londres. Le juge Howard Riddle venait alors d'autoriser son extradition vers la Suède, rejetant les arguments de ses deux avocats vedettes. Le fondateur de WikiLeaks, qui nie les allégations d'agressions sexuelles qui pèsent sur lui, fera appel du jugement.

Les avocats de la défense avaient pourtant sorti l'artillerie lourde aux audiences du 7 et 8 février. Geoffrey Robertson et Mark Stephens avaient remis en cause la validité du mandat d'arrêt délivré par la Suède, allant même jusqu'à dépeindre la procureure générale chargée du dossier, Marianne Ny, comme une misandre qui se plaît à emprisonner des hommes innocents.

Le juge Howard Riddle s'est dit satisfait hier que la demande d'extradition soit recevable, dans la mesure où Julian Assange «ne s'était pas rendu disponible pour être interrogé en Suède» en septembre dernier, quelques semaines après que ses deux présumées victimes eurent porté plainte.

Contrairement à ce que prétendait l'avocat suédois de Julian Assange, Björn Hurtig, «il est très clair que la procureure Marianne Ny a tenté de l'interroger, sans succès, avant son départ de la Suède», a expliqué le juge.

Björn Hurtig avait évoqué dans son témoignage des difficultés à joindre son client. Julian Assange est reconnu pour changer de téléphone cellulaire comme de chemise.

Assange accuse les États-Unis

À la sortie de la salle d'audience, Julian Assange avait l'air d'un homme abattu. Aperçu dans une salle de conférence où il se recueillait, il avait le dos voûté, la tête basse et le regard fixe. Son entourage, qui comptait plusieurs personnalités dont Bianca Jagger - icône de la mode dans les années 70 et ex-femme du chanteur des Rolling Stones Mick Jagger - discutait en retrait.

Devant les caméras du monde entier, il a suggéré à nouveau qu'il était victime d'une machination. «Quel rôle les États-Unis ont-ils joué dans cette demande d'extradition? a-t-il demandé. Pourquoi moi, un militant travaillant pour une organisation à but non lucratif, dois-je verser une caution de 360 000$ pour ma liberté conditionnelle? Pourquoi suis-je en résidence surveillée alors que je n'ai été inculpé dans aucun pays et que je n'ai jamais fui la justice?»

L'homme de 39 ans peut faire appel à deux reprises en Grande-Bretagne: devant la Haute Cour puis devant la Cour suprême. La bataille judiciaire pourrait donc s'étirer jusqu'à l'été.

Encore faut-il qu'il soit capable de payer ses frais de justice. La seule traduction de documents suédois lui a coûté 50 000$, selon ses avocats.

D'ailleurs, il multiplie les avenues pour encourager les dons à son fonds de défense. Des t-shirts à son effigie sont maintenant en vente sur le site de WikiLeaks. Il a également monnayé un discours enregistré exclusivement pour des donateurs le 9 février dernier.

Cependant, à en croire Julian Knowles, sommité en matière de procès d'extradition, la partie est déjà perdue. «À moins que M. Assange puisse prouver son innocence, il sera jugé», a dit l'avocat de la firme Matrix cette semaine à la BBC.