Le ministre de l'Intérieur Claude Guéant, l'UMP et les hôtels Sofitel d'Accor ont vigoureusement nié dimanche qu'un «complot» ait été ourdi contre Dominique Strauss-Kahn à New York en mai, un journaliste américain affirmant qu'on a voulu nuire au favori de la présidentielle.

Dans une enquête du magazine New York Review of Books, le journaliste Edward Epstein relance le feuilleton DSK et les interrogations sur un piège qui aurait été tendu à l'ex-patron du FMI le 14 mai au Sofitel de Manhattan, où il a été accusé d'avoir violé une femme de chambre.

«On est en vrai fantasme!», s'est exclamé Claude Guéant. «J'ai lu l'article écrit par M. Epstein», a dit le ministre lors de l'émission Le Grand Rendez-vous Europe1/I-télé/ Le Parisien: «Qu'est-ce qu'il remarque? Que DSK a égaré son téléphone. Ce n'est pas parce qu'il a égaré son téléphone qu'il y a complot».

Interrogé par l'AFP, Dominique Strauss-Kahn a répondu n'avoir «aucun commentaire à faire sur les articles de M. Epstein».

Ce journaliste réputé, qui dit avoir travaillé «cinq mois» sur l'affaire DSK, affirme que M. Strauss-Kahn avait été alerté le 14 mai au matin, par une amie travaillant à l'UMP, que son téléphone BlackBerry avait probablement été piraté, l'un de ses courriels privés ayant été lu au parti de Nicolas Sarkozy.

Le même jour, DSK avait appelé Anne Sinclair pour lui dire que «quelque chose de grave (était) arrivée». Plusieurs proches ont affirmé à l'AFP qu'il faisait référence à son BlackBerry perdu, pensant qu'il avait été «piraté».

Le secrétaire général de l'UMP Jean-François Copé a vivement dénoncé une «thèse du complot (...) grotesque». Il a exclu toutefois une action en justice contre ces assertions. L'ex-premier ministre Dominique de Villepin a également jugé «totalement prématuré de s'engouffrer» dans une théorie du complot.

M. Epstein, lui-même, se refuse à parler de «complot politique», tout en se disant convaincu qu'on a voulu «faire capoter» la candidature du favori socialiste pour 2012.

Aux yeux de M. Guéant, «si quelqu'un (...) estime qu'il y a complot, il n'a qu'à déposer une plainte».

Des partisans de M. Strauss-Kahn, réunis en un club DSK, ont justement demandé au parquet d'ouvrir une enquête. Mais une avocate de DSK, Frédérique Baulieu, a dit que pour l'heure «aucune initiative» judiciaire n'était prise.

Le journaliste américain affirme également que le procureur de New York avait en main les enregistrements de vidéo-surveillance du Sofitel, dans lesquels on voit deux hommes se réjouir et se congratuler pendant trois minutes après avoir entendu le récit de la femme de chambre.

«Ces faits ont duré huit secondes, sans qu'aucune 'extraordinaire danse de fête' n'ait pu être constatée», ont contesté les hôtels Sofitel, propriété du groupe Accor. «Les deux employés interrogés ont catégoriquement nié que cet échange ait quelque lien que ce soit avec M. Strauss-Kahn», a précisé la société dans un communiqué. En réponse, M. Epstein a enjoint Accor de diffuser «la vidéo en entier».

Interrogé également sur la présence éventuelle d'enquêteurs français au Sofitel le 14 mai, M. Guéant a dit «assurer qu'il n'y avait pas de policiers français parmi ces deux personnes identifiées comme des membres du personnel» de l'hôtel.

Le Sofitel avait prévenu Accor le 14 mai vers 16h45 (heure de Montréal) de l'arrestation une heure auparavant de DSK à bord d'un avion d'Air France à New York. Accor, par la voix de son chef de la sécurité de l'époque, René-Georges Querry, avait alors alerté Ange Mancini, coordonnateur national du renseignement à l'Élysée.

Ces deux anciens policiers se connaissent.

M. Querry s'est dit «totalement étranger à quelque opération que ce soit pour tenter de déstabiliser DSK», jugeant que «vouloir à partir de là broder une théorie du complot relève du fantasme absolu».