Kindra Arnesen habite Buras, au sud du delta du Mississipi, en Louisiane. Le 26 mai, un mois après le début de la marée noire, cette femme de pêcheur a fait preuve de tant de ténacité et de perspicacité lors d'une assemblée publique qu'un commandant de la Garde côtière lui a donné accès à toutes les réunions et toutes les opérations en mer. On la compare déjà à Erin Brockovich. La Presse l'a interviewée au téléphone.

Q Que pensez-vous des efforts de BP et des autorités?

R J'ai assisté aux réunions quotidiennes où il y a les gens de BP et à celles de toutes les agences fédérales. Je suis montée à bord des avions de la Garde côtière, des hélicoptères, des bateaux. Je suis allée partout où on voudrait aller pour comprendre ce qui se passe. Et je ne suis pas du tout impressionnée. À partir de la mi-juin, j'ai commencé à entendre: «Il faut diminuer les coûts.» Ce problème va durer pendant des années et ils parlent déjà de diminuer les coûts! Alors qu'on en est là justement pour avoir sabré dans les dépenses et tourné les coins ronds!

Q Vu de loin, les moyens déployés semblent pourtant imposants.

R Au début, j'entendais les responsables employer les termes «poneys et ballons». Après 10 jours, j'ai appris ce que cela voulait dire. C'est un cirque. Dès qu'un responsable vient visiter les lieux, toutes les ressources sont déployées. Et quand le visiteur s'en va, de 75% à 80% des ressources s'en vont aussi. C'est comme ça tous les jours. Ça se déroule sous mes yeux. Je ne suis pas d'accord et je suis sûre que notre grand peuple n'est pas d'accord non plus. Ce n'est pas du nettoyage, c'est du camouflage!

Q Vous avez demandé l'évacuation de votre ville. Pourquoi?

R Tout le monde a des gens dans leur famille qui ont des problèmes avec l'air pollué par le pétrole et les agents dispersants. Sans parler de ceux qui travaillent au nettoyage. Ma fille de 8 ans s'est mise à faire des éruptions sur la peau. J'ai des amis dont la fille fait du psoriasis et dont la maladie est maintenant impossible à maîtriser. Elle a des cloques par-dessus ses plaques. Ma mère habite la maison d'à côté et maintenant, elle arrive essoufflée chez moi. Les autorités nous disent que la qualité de l'air est bonne et de nous enfermer à l'air conditionné quand elle devient mauvaise. C'est inacceptable! Maintenant, je suis à la recherche d'une maison à trois ou quatre heures de route d'ici pour ma famille, ce qui me permettrait de continuer à militer pour ma communauté.