Maintenant que la fuite a été enrayée au fond du golfe du Mexique, le nettoyage de la marée noire revient au coeur des préoccupations et une question lancinante se pose: où est passé tout le pétrole qui s'est déversé dans l'océan depuis trois mois?

Trois longs mois durant, les choses étaient simples: tel un encrier plongé dans l'eau, le puits endommagé déversait sa ration quotidienne de brut dans l'océan.

Puis, soulagement, le 15 juillet: le groupe britannique BP et les autorités américaines annonçaient avoir réussi à stopper l'écoulement à l'aide d'un «entonnoir».

Vint l'heure des comptes. Entre 397 et 715 millions de litres de pétrole se seraient écoulés dans la mer. Mais seul un quart de ce volume aurait été récupéré par le géant pétrolier.

En surface toutefois, BP a sorti le grand jeu. Tout d'abord en procédant à quelque 411 incendies contrôlés de pétrole et de gaz, puis en déployant des centaines de navires «écumeurs».

Une stratégie payante, puisque, depuis 12 jours que le brut ne s'écoule plus, BP et les autorités américaines sont bien en peine de trouver du pétrole à récupérer.

«Ce que nous voyons, ce sont des centaines de milliers de taches de pétrole. Le défi est de réussir à les trouver, parce qu'elles sont réparties» sur une immense surface et donc «très difficiles à repérer», explique l'amiral Thad Allen, chargé de la lutte contre la marée noire par le gouvernement américain.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes: avant la pose de l'«entonnoir», la fuite crachait des millions de litres par jour. La semaine dernière, alors que les équipes se préparaient à évacuer la zone en prévision de l'arrivée de la tempête tropicale Bonnie, ce volume était tombé à 9.000 litres quotidiens.

Alors, qu'est devenu le brut, celui qui n'a pas été récupéré par les bateaux ou qui n'est pas parti en fumée au cours des incendies contrôlés?

Impossible de donner une seule réponse. Certains experts pensent qu'il a été englouti par les organismes marins, d'autres, moins optimistes, estiment qu'il pourrait stagner dans les profondeurs du golfe du Mexique.

«Nous savons qu'une partie significative du pétrole a été dispersée et biodégradée par des bactéries (...) qui sont présentes en nombre dans le golfe du Mexique», avance la directrice de l'Agence océanique et atmosphérique américaine (NOAA), Jane Lubchenco.

«Nous sommes en train de faire une analyse poussée pour mieux comprendre où est passé le pétrole», ajoute-t-elle.

En tout cas, les avions qui survolent constamment la zone de la marée noire ont bien du mal à détecter des nappes de brut dignes de ce nom.

Le dernier bulletin de la NOAA ne relève que sept couches de ce type --toutes très légères-- flottant en surface.

Et à l'approche de la phase finale de la lutte contre la catastrophe -la fermeture définitive du puits, attendue la semaine prochaine- Thad Allen pense déjà à la suite des opérations.

L'«après» consistera surtout en un minutieux travail d'évaluation des dégâts causés par le pétrole sur les rivages. Quelque 1.027 km de côtes ont été souillés par le brut.

Si le nettoyage des plages ne devrait demander qu'un effort minimal, l'élimination du brut dans les marécages devrait donner bien des maux de tête aux autorités.

Le géologue Ed Owens, engagé par BP pour aider à organiser la protection des rivages, rejette tout alarmisme. Il estimait lundi que les marécages, qui abritent une faune foisonnante, devraient avoir récupéré d'ici quelques mois, car seul un «faible volume» de pétrole y a pénétré.