La tempête tropicale Tomas, qui a fait un mort jeudi, se transformait en ouragan vendredi dans les Caraïbes, menaçant Haïti et Cuba, ont indiqué les météorologues du Centre national américain des ouragans (NHC).

«Le centre de Tomas va passer près de la partie occidentale d'Haïti ce matin, à proximité ou au-dessus de la partie très orientale de Cuba aujourd'hui et près ou au-dessus du sud-est des Bahamas et des îles Turks et Caicos en fin de journée ou ce soir», a indiqué le NHC dans un bulletin.

Les Haïtiens étaient sur le pied d'alerte, jeudi soir, à l'approche de la tempête tropicale Tomas, qui menaçait de laisser dans son sillage des inondations meurtrières et de violents glissements de terrain.

Les autorités haïtiennes ont ordonné, jeudi, la fermeture des écoles et commencé à évacuer les camps de fortune érigés après le séisme de janvier où s'entassent plus d'un million de personnes. La plupart des sinistrés seraient toutefois restés sur place - pour protéger leurs quelques biens ou parce qu'ils n'ont nulle part où aller.

«Mes soeurs et frères, quittez les zones à risque, je vous en supplie», a imploré le premier ministre haïtien, Jean-Max Bellerive, au cours d'une allocution télévisée prononcée en compagnie des principaux ministres du gouvernement. «Il y aura des averses et du vent sur tout le pays, ne soyez pas têtus, déplacez-vous si vous êtes dans des endroits fragiles.»

À 17h heure de Montréal, Tomas se trouvait à 450 km au sud-ouest de Port-au-Prince, avec des vents soufflant à 85 km/h, selon le Centre national des ouragans des États-Unis (NHC). La tempête progressait vers le nord à 7 km/h et devait se transformer en ouragan. À cette vitesse, le centre de la tempête devait passer près de la Jamaïque et d'Haïti au cours de la nuit dernière. Selon les projections du NHC, des pluies torrentielles menaçaient aujourd'hui le nord, le sud et l'ouest du pays.

Des habitants de Port-au-Prince joints par La Presse ont rapporté qu'une fine pluie avait commencé à tomber sur la capitale à partir de 18h (heure de Montréal). On ne recensait pas encore de vents violents.

«Il y a un gros nuage dense et épais qui s'est formé au-dessus de la ville au cours de la journée», a raconté Étienne Côté-Paluck, journaliste québécois indépendant établi à Port-au-Prince. «La crainte, c'est que la pluie qui a commencé à tomber devienne torrentielle et dure 10, 12, voire 20 heures et inonde les camps et les zones où vivent les gens les plus pauvres.»

«Je n'ai pas encore observé de mouvement de panique au sein de la population, mais il y a beaucoup d'inquiétude», a ajouté Gypsy Michel, travailleur humanitaire du Centre d'étude et de coopération internationale, une ONG québécoise. «Le défi, c'est d'héberger une population qui n'est pas guérie du traumatisme du tremblement de terre et d'avoir accès à une population très fragile.»

Tension dans les camps

Alors que Tomas continuait à progresser vers Haïti, la peur et la confusion ont commencé à balayer plusieurs des camps. À Corail Cesselesse - plus grand camp de la région de Port-au-Prince -, la tension a commencé à se faire sentir en matinée, lorsque des gestionnaires ont tenté d'expliquer à quelque 8000 réfugiés qu'ils devaient quitter leur refuge d'urgence ShelterBox, censé être en mesure de résister à un ouragan.

En matinée, un policier équipé d'un mégaphone a fait la tournée de Corail Cesselesse pour inciter les réfugiés à déménager. «L'ouragan n'est pas une blague... Vous devez vous en aller d'ici», a-t-il crié.

Un journaliste de l'Agence France-Presse a toutefois été à même de constater, jeudi, que certaines tentes avaient été abandonnées. Mais alors que le vent commençait à souffler, la plupart des résidants refusaient de partir.

«Je veux rester ici, je suis jeune, je peux me battre contre les intempéries. Je ne vais pas abandonner mon espace de vie», a raconté Jean Wilford, jeune homme d'une vingtaine d'années.

Une cigarette à la main, Natacha Jean refusait aussi de quitter le camp. «Nous ne partirons pas d'ici, personne ne pourra nous déplacer, nous sommes ici depuis huit mois, nous n'abandonnerons pas notre tente, a-t-elle assuré. Pour aller où? J'ai un enfant, je veux rester ici.»

Mobilisation

Le plan improvisé mis en place dans plusieurs camps visait à déplacer les réfugiés vers des écoles, des églises ou même des prisons abandonnées. Les autorités ont toutefois conseillé à la majorité des sans-abri de se réfugier chez des proches.

Le gouvernement haïtien a affirmé jeudi qu'un millier de refuges d'urgence étaient disponibles. Selon The Associated Press, ce nombre englobait probablement n'importe quel immeuble capable de résister à des vents forts.

Les États-Unis ont dépêché mardi un porte-hélicoptères devant apporter une aide humanitaire, tandis qu'à Port-au-Prince, l'ONU a mis de côté des vivres pour répondre aux besoins de 1,1 million de personnes.

En raison des inondations prévues, le ministre de la Santé publique, Alex Larsen, a par ailleurs prévu une aggravation de l'épidémie de choléra, qui a fait au moins 442 morts jusqu'à présent. «La situation va s'aggraver davantage si vous n'observez pas les consignes d'hygiène», a-t-il dit à la population.

Une alerte d'ouragan était en vigueur jeudi pour Haïti, le sud-est des Bahamas, les îles Turks et Caicos et la province cubaine de Guantánamo. Un avertissement de tempête tropicale a également été émis en Jamaïque.

Lors de son passage samedi à Sainte-Lucie, île située au sud de la Martinique, Tomas a fait 14 morts. Tomas, alors à l'état d'ouragan, avait frappé l'île avec des vents soufflant à 150 km/h.

- Avec Agence France-Presse et Associated Press