Wait and see (attendre et voir): Hillary Clinton, la chef de la diplomatie américaine, a laissé entendre lundi à son homologue Alain Juppé qu'elle jugeait prématurée l'idée française d'une conférence de paix sur le Proche-Orient, faute de volonté des parties.

M. Juppé, en visite dans la capitale américaine après une tournée dans la région, a fait mine de se contenter de cet accueil réservé, préférant relever la convergence entre Paris et Washington sur le fait que «le statu quo ne peut plus durer» entre Israéliens et Palestiniens.

La France a dévoilé le 2 juin un projet de conférence de paix israélo-palestinienne sur la base des paramètres énoncés en mai par le président américain Barack Obama: la création de deux États sur la base des lignes de juin 1967, modifiées par des échanges agréés par les deux parties.

Ce projet de réunion, que Paris aimerait organiser avant la fin juillet, n'a jusqu'à présent vraiment suscité l'adhésion que du président palestinien Mahmoud Abbas, et encore, puisque le Hamas avec lequel M. Abbas s'est réconcilié juge «absurde» l'idée de négocier avec Israël.

Côté israélien, le Premier ministre Benjamin Nétanyahou a fait savoir, sans plus de détails, qu'il «soupesait» l'offre française.

Alain Juppé a souligné lundi que faute d'avancée avant l'Assemblée générale des Nations unies en septembre à New York, le processus de paix se trouverait dans une situation encore plus désespérée. Il faisait référence à l'intention des Palestiniens de demander l'adhésion de leur État à l'ONU sur les lignes de 1967 (Cisjordanie, Jérusalem-Est et Gaza).

Mais Hillary Clinton, à ses côtés lors d'un point de presse, a insisté sur les obstacles à l'initiative de Paris.

«L'idée d'une réunion quelle qu'elle soit ou d'une conférence doit être associée à une volonté des parties de reprendre la négociation», a-t-elle observé. «Nous soutenons fermement un retour aux négociations, mais nous ne pensons pas qu'une conférence sur le retour aux négociations serait productive.»

Pour la secrétaire d'État, il faut d'abord «un retour aux négociations, qui demandera beaucoup de persuasion et de travail préparatoire, de manière à organiser une rencontre productive entre Israéliens et Palestiniens».

C'est ce que fait l'administration américaine: outre M. Juppé, Mme Clinton a reçu successivement lundi Saëb Erakat, le négociateur palestinien, puis l'émissaire israélien Yitzhak Molcho.

En conclusion selon elle, «notre attitude actuelle est d'attendre de voir, parce que nous n'avons encore aucune assurance des parties» concernant leur volonté de reprendre le dialogue.

Commentant sa tournée dans la région ces derniers jours, ainsi que son entretien avec Mme Clinton, Alain Juppé s'est toutefois voulu optimiste.

«Je suis assez agréablement surpris», a-t-il dit, «parce que les Palestiniens ont réagi positivement, les Israéliens n'ont pas dit non, et la secrétaire d'État a dit ''wait and see''».

Français et Américains partagent la même analyse, a dit un peu plus tard à la presse Saëb Erakat.

«Je ne pense pas que le problème soit Juppé, ni que le problème soit Clinton, ni la Suède ou la Chine», a-t-il lancé aux journalistes: «Le problème, c'est le Premier ministre d'Israël, qui refuse la solution à deux États».