Le Japon restait dimanche sous la menace d'un grave accident nucléaire, deux jours après le séisme et le tsunami dévastateurs qui ont frappé la côte nord-est du pays. La situation s'est encore aggravée à la centrale Fukushima Dai-ichi, où un second réacteur suscitait une vive inquiétude.

L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a annoncé dimanche avoir été informée par le Japon qu'une deuxième centrale électrique, celle d'Onagawa, était placée en état d'urgence des niveaux de radioactivités supérieurs aux seuils autorisés ayant été constatés. Elle a précisé que les trois réacteurs de la centrale étaient sous contrôle.

Le système de refroidissement de la centrale nucléaire de Tokai Dai-Ni (à 120 km au nord de Tokyo) a été endommagé par le tremblement de terre. D'après la Compagnie japonaise de l'énergie atomique (JAPC), l'une des deux pompes est hors service mais la seconde fonctionne normalement. La JAPC affirme qu'il n'y a aucun risque de fuite radioactive.

Parallèlement, l'électricien TEPCO et le gouvernement ont annoncé que le courant allait être rationné de façon étalée dans plusieurs villes du pays, dont Tokyo. Des coupures quotidiennes de trois heures débuteront ainsi lundi. Le ministre du Commerce Banri Kaieda a précisé que TEPCO s'attendait à une baisse de la production de 25 pour cent.

À Fukushima, les autorités ont reconnu dimanche qu'une fusion partielle était «possible» dans le coeur du réacteur No3 et prévenu qu'une nouvelle explosion à l'hydrogène risquait de se produire au cours des efforts pour le refroidir. Les opérateurs de l'électricien TEPCO, qui exploite la centrale, luttaient toujours dimanche pour refroidir les réacteurs menacés en injectant de l'eau de mer, un dernier recours pour éviter une fusion du coeur, c'est-à-dire une fonte des combustibles à l'intérieur de ces réacteurs.

Une fusion totale, soit la perte de contrôle du réacteur, pourrait provoquer une fuite d'uranium et de matières dangereuses dans l'environnement, entraînant une pollution radioactive majeure.

Le séisme de vendredi a provoqué une défaillance du système de refroidissement de la centrale de Fukushima Dai-ichi, à 270km au nord-est de Tokyo, coupant l'alimentation électrique et affectant la station de pompage. Trois réacteurs ont été automatiquement arrêtés et connaissent des problèmes de refroidissement.

Après le réacteur No1, le No3 connaissait une situation préoccupante dimanche. Le secrétaire général du gouvernement japonais Yukio Edano a expliqué que les opérateurs tentaient de refroidir et d'abaisser la pression dans ce réacteur, comme ils l'avaient fait la veille pour le No1. «Nous prenons des mesures sur le réacteur 3 sur la base d'une possibilité semblable» de fusion partielle du coeur, a-t-il expliqué.

Dimanche, les opérateurs de TEPCO ont ainsi procédé à des rejets d'air légèrement radioactif pour abaisser la pression, tout en injectant de l'eau pour réduire la température, selon M. Edano. Il a précisé que les niveaux de radioactivité à l'extérieur de la centrale avaient brièvement dépassé les seuils légaux, mais avaient décliné depuis de façon significative. Il a aussi reconnu que des barres de combustible avaient brièvement été exposées, laissant entendre qu'à un moment, elles n'étaient plus recouvertes par l'eau de refroidissement.

Comme la veille, une explosion à l'hydrogène risquait de se produire lors de ses efforts. «Au risque d'accroître encore l'inquiétude de la population, nous ne pouvons exclure la possibilité d'une explosion», a admis M. Edano. Mais «s'il se produit une explosion, néanmoins, il n'y aurait pas d'impact significatif sur la santé humaine», a-t-il affirmé.

Samedi, une explosion était survenue au niveau du réacteur No1 de la centrale, provoquant l'effondrement des murs du bâtiment. L'explosion s'était produite alors que les opérateurs, faute de courant électrique et les valves et les pompes de la centrale ayant été endommagées par le tsunami, tentaient de refroidir le coeur du réacteur en injectant de l'eau de mer borée dans l'enceinte de confinement. Lorsque de l'hydrogène a été relâché pour diminuer la pression à l'intérieur du réacteur, une réaction s'est apparemment produite avec l'oxygène, contenu dans l'air ou l'eau de refroidissement, provoquant l'explosion.

Plus de 170 000 personnes ont été évacuées par précaution autour de la centrale, même si Yukio Edano affirmait que le niveau de radioactivité relâché jusqu'à présent était peu important et ne posait pas de menace pour la santé. Des pastilles d'iode ont été distribuées pour prévenir des cancers de la thyroïde provoqués par de l'iode radioactive.

Dans un centre d'évacuation de Koriyama, à 60km de la centrale de Fukushima et à 190 kilomètres au nord de la capitale, des médecins avaient déjà examiné quelque 1500 personnes pour vérifier qu'elles n'avaient pas été irradiées. Dimanche, quelque dizaines de personnes attendaient devant des tentes bleues installées sur un parking devant un gymnase pour être contrôlées.

Selon la préfecture de Fukushima, citée par l'agence de presse Kyodo, 19 personnes évacuées dans un rayon de trois kilomètres autour de la centrale de Fukushima Dai-ichi ont été exposées à des radiations, en plus des trois autres dont l'exposition était déjà confirmée.

Et jusqu'à 160 autres personnes, dont 60 patients âgés et personnels médicaux qui attendaient d'être évacués dans la ville voisine de Futabe et une centaine de personnes qui étaient évacuées par autocar, pourraient avoir été exposées, selon Ryo Miyake, un porte-parole de l'agence nucléaire nippone. Les personnes concernées ont été conduites à l'hôpital.

Après le séisme vendredi, les autorités nippones avaient placé au total cinq réacteurs, dont ceux de Fukushima Dai-ichi en état d'urgence. La liste a été portée dimanche à six, dont trois à la centrale Dai-ichi et trois dans un complexe voisin. Le Japon possède au total 55 réacteurs dans 17 complexes nucléaires.