Un troisième réacteur a explosé à la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, lundi soir, laissant craindre le spectre d'un catastrophe nucléaire majeure dans la région, située à 250 kilomètres de Tokyo.

L'explosion a brièvement fait grimper les niveaux de radioactivité à plus de 8200 millisieverts (mSv), soit huit fois la limite légale, dans les environs de la centrale.

Lundi soir, tous les grands réseaux d'information ont retiré leurs journalistes des environs de Fukushima. Selon un journaliste japonais, il y aurait un mouvement de panique à Fukushima. Les citoyens ont du mal à quitter l'endroit car les routes sont bondées et les stations-service n'ont plus d'essence.

«Un photographe de l'agence Polaris m'a dit qu'il y avait une panique, a rapporté le photographe de Forbes, Yas Idei, à Tokyo. Les gens ne peuvent quitter car il n'y a plus d'essence et les équipes de secours ne sont plus là.»

Le gouvernement a ordonné l'évacuation des citoyens qui résident à moins de 20 kilomètres de la centrale. Les gens qui habitent à l'extérieur de cette zone, mais à moins de 30 kilomètres de la centrale, doivent rester chez eux et fermer leur système de ventilation.

Incendie

Peu de temps après l'explosion, le premier ministre Naoto Kan a dit dans un discours à la nation, qu'un nouvel incendie s'était déclaré dans le réacteur numéro 4 de Fukushima Daiichi. Les lectures radioactives enregistrées près de la centrale proviendraient de cet incident, a-t-il dit, ajoutant que le personnel et le gouvernement faisaient tout pour régler la situation.

«Les gens qui tentent de maîtriser les réacteurs à Fukushima risquent leur santé», a dit le premier ministre.

L'ancien directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Olli Heinonen, a dit être préoccupé par les nouvelles émanant de Fukushima. «Je crois que la situation est toujours très, très inquiétante. Le pire n'est pas derrière nous», a-t-il dit.

Les experts ont décrit l'explosion, enregistrée à 6h10, heure locale, comme étant la plus grave d'une série de trois explosions survenues à la centrale depuis vendredi. «Il s'agit de l'accident nucléaire le plus sérieux survenu au Japon», a dit le professeur Kenji Sakimura, interviewé par la chaîne NHK.

L'exploitant de la centrale, Tokyo Electric Power (TEPCO), a dit que le personnel non essentiel avait été évacué. Une cinquantaine de travailleurs sont toujours sur place pour contrôler les autres réacteurs. Le Japon a officiellement demandé à l'AIEA l'envoi d'une équipe d'experts après les explosions, a déclaré le directeur général de l'agence onusienne, Yukiya Amano.

L'enceinte de confinement du réacteur, qui contient les barres de combustible atomique, a été endommagée durant l'explosion du réacteur numéro 2, mais n'a pas été trouée, selon les autorités japonaises. Un responsable de l'Agence de sécurité nucléaire japonaise a indiqué que cette enceinte n'avait pas «été trouée, car le niveau de radioactivité n'a pas bondi».

«Pas de nouveau Tchernobyl»

Dans un point de presse convoqué à 5h30 du matin, heure locale, Naoto Kan avait déclaré que la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi «ne possède pas de capacité de refroidissement suffisante» pour stabiliser ses réacteurs, ajoutant qu'une nouvelle explosion à la centrale était envisageable.

Les réacteurs 1 et 3 ont explosé, dans les trois derniers jours, envoyant du matériel radioactif dans l'atmosphère. À la centrale de Fukushima, selon l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire français (IRSN), «le débit de dose à la limite du site, lors de l'explosion, aurait atteint 1 mSv par heure», soit «un rejet très important». On ignore cependant les doses reçues par les ouvriers qui se trouvaient sur le site.

Le secrétaire général du cabinet, Yukio Edano, a assuré que, dans le pire des scénarios, la situation à la centrale de Fukushima ne «deviendra pas un nouveau Tchernobyl». Malgré leurs problèmes, les réacteurs sont construits de manière à contenir les émanations radioactives importantes, a-t-il dit.

Lundi, le maire de Tokyo a annoncé le début d'une batterie de tests visant à déceler d'éventuelles émanations radioactives dans la plus grande ville du monde, selon la chaîne NHK. Depuis quelques jours, les vents qui soufflent sur Fukushima poussaient les vapeurs vers l'océan, mais ils ont changé de direction, lundi, et soufflent maintenant vers Tokyo.

Un niveau de radioactivité supérieur à la normale a d'ailleurs été détecté lundi soir à Tokyo, a annoncé la municipalité en précisant que ce niveau était trop faible pour pouvoir affecter la santé humaine.

Peu d'espoir

Par ailleurs, les espoirs de trouver des personnes vivantes coincées dans les décombres ont pratiquement disparu, lundi, près de quatre jours après le désastre de vendredi. Plus de 2400 victimes ont été retrouvées, selon les autorités, tandis qu'au moins 15 000 personnes manquent toujours à l'appel.