L'apocalypse. Au cours de la journée d'hier, les informations en provenance de la centrale nucléaire de Fukushima ont nourri les inquiétudes au Japon comme partout dans le monde. Le commissaire européen à l'Énergie, Günther Oettinger, a qualifié hier l'accident d'« apocalypse «, ajoutant que les autorités locales avaient perdu la maîtrise de la situation à Fukushima. Depuis le séisme et le tsunami de vendredi, les problèmes se succèdent à la centrale nucléaire.

À Fukushima, la situation s'est encore détériorée mercredi matin, alors qu'un nouvel incendie s'est déclaré au réacteur 4 de la centrale, située à 250 km au nord-est de Tokyo. Depuis le séisme et le tsunami, les autorités japonaises tentent désespérément d'endiguer la crise. En même temps, la crainte d'une contamination nucléaire grandit.

Mercredi matin, les Japonais se sont réveillés en apprenant qu'un autre incident à la centrale, dans l'enceinte de confinement du réacteur, où, la veille, un incendie dû à des dégagements d'hydrogène s'était déclaré près d'une piscine où est entreposé le combustible usé. L'incendie a été maîtrisé, mais peu après, de la fumée s'échappant de la centrale nucléaire a été vue à la télévision.

Un responsable de l'exploitant de la centrale, Tokyo Electric Power (Tepco), a déclaré au cours d'une conférence de presse ne pas connaître exactement l'origine de la fumée, indiquant toutefois qu'elle paraissait provenir du réacteur 3.

La centrale de Fukushima, arrêtée automatiquement après le séisme, est victime d'une série de défaillances à la suite de la panne des circuits de refroidissement des réacteurs. Mardi, une explosion a provoqué un premier incendie et troué le toit du bâtiment extérieur du réacteur 2 : l'enceinte de confinement, qui entoure le coeur du réacteur, afin d'éviter toute contamination radioactive, pourrait être endommagée.

En début de journée mercredi, le niveau de radiation à la centrale a grimpé jusqu'à 1000 mSv, ce qui est suffisant pour causer très rapidement la maladie des rayons (radiation sickness). Il est ensuite redescendu à 600 ou 800 mSv, ce qui reste nocif pour la santé. «Les travailleurs ne peuvent même plus faire le strict minimum», a expliqué le chef de cabinet, Yukio Edano.

Scénario catastrophe

Au cours de la journée d'hier, les réactions ont été vives partout dans le monde à l'égard de la gravité de l'accident de Fukushima. Évoquant une situation « doublement aggravée « avec « l'endommagement possible de l'enceinte de confinement « du réacteur 2 et « l'exposition des combustibles usés de la piscine d'entreposage du réacteur 4 «, le président de l'Autorité française de sûreté nucléaire (ASN) a estimé que la situation a atteint un niveau de gravité 6 sur l'échelle internationale, qui en compte 7.

« Ce sont des événements très inquiétants «, a dit le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Yukiya Amano. Le toit du réacteur numéro 2 pourrait être fissuré, selon l'AIEA. Malgré tout, M. Amano est toujours convaincu que la situation à Fukushima est différente de celle de Tchernobyl, le pire accident nucléaire jamais survenu. Près des réacteurs de Fukushima, quelque 180 000 Japonais ont été évacués. Les autorités recommandent vivement aux Japonais habitant à moins de 30 kilomètres de la centrale nucléaire d'éviter de sortir.

Au Japon, « on parle d'apocalypse et je crois que le mot est particulièrement bien choisi «, a dit hier Günther Oettinger. « Pratiquement tout est hors de contrôle, et je n'exclus pas le pire dans les heures et les jours à venir «, dit-il.

Des destructions massives

Quatre jours après le séisme et le tsunami, on ignore encore l'ampleur des dégâts. Plus de 11 000 personnes sont mortes ou portées disparues depuis vendredi, dans ce qui reste l'événement le plus funeste au Japon depuis la Seconde Guerre mondiale. Plusieurs villes côtières ont été ravagées par le tsunami, comme en témoignent les photos publiées sur les fils de presse. C'est le cas d'une petite ville portuaire, Minamisanriku, au nord-est du Japon, dont il ne reste presque plus rien. 10 000 personnes y sont probablement mortes, selon la police locale, alors que la ville ne compte que 17 000 habitants.

Le Japon est victime d'une impressionnante série de tremblements de terre, suivis de nombreuses répliques. Hier, un fort séisme de magnitude 6 a frappé l'île principale de Honshu, au sud-ouest de Tokyo. L'épicentre a été localisé dans la préfecture de Shizuoka, à environ 120 km de la capitale, près du mont Fuji. Cette nouvelle secousse n'a engendré aucun accident à la centrale nucléaire de Hamaoka, dans le centre du pays, selon l'AEIA.

Réactions autour du monde

La crainte d'une contamination nucléaire a suscité de nombreuses réactions autour du monde, hier.

En Europe, en réponse aux pressions des écologistes et groupes opposés à l'énergie nucléaire, les pays de l'Union ont annoncé qu'ils soumettront leurs centrales à une évaluation. Barack Obama a affirmé hier qu'il souhaitait que les États-Unis se penchent aussi la sécurité et la performance de ses centrales.

D'après AP et AFP, The Globe and Mail et The New York Time

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