Le Canada craint une augmentation de la contrebande de drogue en provenance d'Haïti depuis le séisme qui a ravagé la capitale de ce petit pays des Antilles en janvier dernier.

L'Agence des services frontaliers du Canada a saisi en provenance d'Haïti autant de cocaïne dans les trois premiers mois de l'année que pour toute l'année dernière. Les agents frontaliers ont saisi 5,7 kg de cocaïne de janvier à mars 2010 contre 5,5 kg pour toute l'année 2009, selon un rapport de l'Agence obtenu en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

«De récentes saisies de produits de contrebande en provenance d'Haïti indiquent que le tremblement de terre dévastateur de janvier pourrait mener à une augmentation de la contrebande de drogue en provenance de ce pays», écrit la Division de l'analyse du renseignement et du ciblage de l'Agence dans son rapport trimestriel sur les drogues.

Les contrebandiers profitent du chaos qui règne dans ce pays. «Même si les quantités saisies ne sont pas extraordinairement élevées, la nature de la saisie de cocaïne en provenance d'Haïti révèle que les contrebandiers tirent parti des vols et des activités humanitaires», peut-on lire dans le document en partie caviardé.

Les analystes de l'Agence donnent l'exemple de cette Canadienne de retour d'Haïti via l'aéroport international Montréal-Trudeau arrêtée avec 2 kg de cocaïne fixés à son corps avec du ruban adhésif le 14 février dernier, moins d'un mois après le tremblement de terre.

La Presse avait révélé les détails de cette histoire au lendemain de l'arrestation de cette mère de famille de Montréal-Nord. Carmélite Massenat, 52 ans, est soupçonnée d'avoir importé cette drogue à bord d'un avion de rapatriement.

Lors de sa comparution, le juge Pierre Labelle lui avait d'ailleurs reproché ce geste d'une «arrogance difficile à imaginer». Cette présumée trafiquante a pu bénéficier du transport gratuitement, comme tous les autres ressortissants canadiens évacués par Ottawa.

L'Agence des services frontaliers du Canada estime que cette hausse de saisies n'est pas encore alarmante. «Pour l'instant, on ne voit pas une augmentation significative, mais on reste à l'affût de la situation», a expliqué à La Presse son porte-parole, Dominique McNeely.

Le Canada n'est pas le seul à s'inquiéter du phénomène. Avant le séisme, Haïti était déjà une plaque tournante du trafic de drogue provenant de l'Amérique latine à destination des États-Unis en raison de la faiblesse de ses institutions, selon le département de la Justice américain. Or, un mois après le tremblement de terre, les contrebandiers se sont remis au travail, a indiqué un commandant de la garde côtière américaine interviewé par le USA Today en février dernier. Le chaos, l'absence d'emplois et l'évasion de milliers de prisonniers facilitent la tâche aux criminels.

- Avec la collaboration de William Leclerc