La colère aura pesé dans la décision des électeurs républicains de Caroline-du-Sud, qui ont offert à Newt Gingrich une victoire éclatante et surprenante samedi à l'occasion d'une primaire qui a chamboulé la course à l'investiture républicaine pour la présidence.

Colère contre Barack Obama, que l'ancien président de la Chambre des représentants aura canalisée en exprimant un profond mépris pour l'occupant de la Maison-Blanche, qu'il qualifie de «faible», «stupide», «radical» et «dangereux».

Colère contre l'establishment du Grand Old Party, qui aurait voulu imposer aux électeurs républicains de Caroline-du-Sud, un des États américains les plus conservateurs, Mitt Romney, un «modéré du Massachusetts» (une autre expression de Newt Gingrich).

«Mitt Romney est un bon homme, mais nous sommes rendus au point où nous avons besoin de quelqu'un de méchant (mean)», a déclaré Harold Wade, un retraité de 85 ans, en quittant un bureau de vote de Charleston, samedi.

Newt Gingrich a certainement fait preuve de mordant à l'endroit du président Obama et des «élites de Washington et de New York» dans son discours de victoire en Caroline-du-Sud, où il a obtenu 41% des suffrages contre 28% pour Mitt Romney, 17% pour Rick Santorum et 13% pour Ron Paul.

«Personne à Washington et à New York ne comprend le niveau de colère des électeurs contre l'establishment national», a encore dit Newt Gingrich sur CNN hier matin, se posant en outsider malgré ses 20 ans à la Chambre des représentants, dont quatre à titre de président.

Méfiance

Mais la colère n'est pas le seul sentiment qui anime aujourd'hui le GOP. Depuis samedi, l'establishment républicain est en proie à la peur face au retour en force de Gingrich, un politicien à l'humeur volatile qui est perçu de façon négative par une majorité d'Américains, selon les sondages.

Une peur qu'un des anciens collègues du politicien de 68 ans a exprimée de façon frappante dans une interview publiée hier dans le Daily News de New York: «Newt est absolument brillant. Il a 100 idées; 97 sont bonnes, les autres feront sauter le monde.»

Cette peur pourrait se muer en panique si Newt Gingrich surprend Mitt Romney dans la quatrième étape de la course à l'investiture républicaine, la primaire de Floride, qui se déroulera le 31 janvier.

Gingrich et Romney croiseront de nouveau le fer ce soir à l'occasion d'un débat télévisé à Tampa, auquel Rick Santorum et Ron Paul participeront également.

«Mon travail en Floride sera de convaincre les gens que je suis le candidat qui peut clairement battre Barack Obama dans une série de débats et celui qui a des solutions assez conséquentes pour remettre l'Amérique sur les rails», a déclaré Gingrich sur CNN.

La question des impôts de Mitt Romney ne risque pas de revenir sur le tapis à Tampa. Admettant avoir commis une erreur sur cette question, le fondateur de la société d'investissement Bain Capital a annoncé hier matin qu'il rendra publiques demain -et non pas seulement en avril- sa déclaration d'impôts pour l'année 2010 et une estimation de ses revenus pour l'année 2011.

«Certains vont trouver quelque chose à redire, mais nous payons tous nos impôts et je suis certain que tout le monde trouvera qu'il s'agit d'une somme conséquente», a-t-il déclaré sur Fox News.

Gingrich s'est dit satisfait de la décision de Romney. Mais il n'a pas l'intention de lâcher son rival sur d'autres questions, dont celle de l'authenticité.

«Il danse sur des oeufs en tentant de trouver la version de Romney qui fonctionnera», a-t-il déclaré sur CBS hier.

Pour l'heure, Mitt Romney est favori pour l'emporter en Floride, où il obtient 40,5% des intentions de vote contre 22% à Newt Gingrich, selon la moyenne des sondages recensés par le site RealClearPolitics. Il a promis hier de rappeler aux électeurs du Sunshine State les liens que Newt Gingrich a noués au cours des dernières années avec la démocrate Nancy Pelosi et le géant du refinancement hypothécaire Freddie Mac, entre autres bêtes noires conservatrices.

Et le soir du 31 janvier, la colère et la peur auront peut-être changé de camp chez les républicains.