John McCain et Barack Obama s'affronteront à nouveau ce soir, dans un deuxième débat télévisé qui risque d'être plus spontané que leur rencontre précédente.

Organisé à l'Université de Belmont à Nashville, au Tennessee, le débat prendra la forme d'une séance questions-réponses avec l'auditoire. Les candidats pourront aussi réagir aux interrogations des internautes. «Le débat abordera toute question soulevée par le public», précise sur son site internet la Commission des débats présidentiels.

 

Jusqu'ici, ce format a paru avantager John McCain, qui est au mieux de sa forme lorsqu'il se déplace sur scène, son micro en main, parsemant ses réponses de blagues et d'anecdotes. Barack Obama se montre généralement plus professoral durant les débats, un ton moins adapté à ce type d'échanges.

Cela dit, plusieurs analystes estiment que le débat, diffusé à 21h, aura peu d'impact sur la décision des électeurs, préoccupés ces jours-ci par la crise économique.

«Je serais étonné de voir un changement radical dans la course à cause du débat, a dit Stephen Hess, politologue conservateur au Brookings Institute. La rencontre offre peu d'occasions pour John McCain de changer les fondamentaux de cette élection étant donné les préoccupations économiques profondes des électeurs.»

Lors du débat précédent, McCain avait eu du mal à articuler une politique cohérente pour régler la crise économique, se limitant à promettre de «réduire les excès» à Washington. Obama paraissait informé et sûr de lui. Sa remontée dans les sondages s'est poursuivie durant la semaine suivant la rencontre. Sur le plan national, le démocrate a maintenant une avance de six à dix points sur son rival républicain.

Les gants sont tombés

Ce second débat entre Barack Obama et John McCain survient à un moment clé de la campagne présidentielle: celui où les candidats ont laissé tomber les gants.

À moins d'un mois des élections, John McCain tente désespérément de tourner la page sur les questions liées à la crise économique. Mal servi par l'actualité des dernières semaines, le candidat républicain a durci le ton envers son opposant. Depuis dimanche, McCain et sa campagne attaquent Obama sur ses «associations avec des terroristes» et remettent en question son patriotisme et son jugement. Les républicains font référence à Bill Ayers, un radical qui a fait partie du mouvement Weather Underground au début des années 70, quand Obama était enfant. M. Ayers, devenu professeur d'université à Chicago, a travaillé pour des associations caritatives où oeuvrait Barack Obama.

La campagne d'Obama a riposté, hier, en lançant une campagne publicitaire internet sur le scandale Keating-Five, qui a terni la réputation de McCain au début des années 90 (voir encadré). Les démocrates diffusent aussi une publicité accusant McCain d'avoir «un tempérament imprévisible» et de manquer de jugement lors d'une crise. Certains critiques accusent le camp Obama de chercher à dépeindre McCain comme étant trop vieux et confus pour assumer la présidence.

Le troisième et dernier face-à-face télévisé aura lieu le 15 octobre à la Hofstra University à Hempstead, dans l'État de New York.

 

Nicolas BérubéQu'est-ce que le scandale des «Keating-Five» ?

À la fin des années 80, l'homme d'affaires de l'Arizona Charles Keating menait une vie de luxe. L'entreprise qu'il présidait, la Lincoln Savings&Loan, était extrêmement rentable. Ses connexions politiques étaient légendaires. Un de ses alliés était le sénateur John McCain, qui a reçu plus de 110 000$ en financement électoral de sa part. Keating était si proche de McCain que les deux hommes passaient leurs vacances dans le Sud ensemble, avec leurs familles. En 1987, le gouvernement fédéral, qui enquêtait depuis des années sur Keating, était sur le point de déposer des accusations de fraude. C'est alors que cinq sénateurs proches de l'homme d'affaires ont convoqué une rencontre avec un superviseur chargé du dossier, William Black. M. Black a dit que la rencontre n'avait qu'un seul but. «Les sénateurs voulaient m'intimider et demander que l'enquête sur Keating prenne fin.» Parmi les cinq politiciens présents à la rencontre se trouvait John McCain. La firme de M. Keating a fait faillite peu après. Plus de 3,5 milliards de dollars appartenant aux épargnants sont partis en fumée. En 1991, le comité d'éthique du Sénat a conclu que McCain avait «manqué de jugement» en s'associant avec Keating. McCain a par la suite écrit que l'affaire Keating était «la plus grosse erreur de (sa) carrière».