C'est l'histoire d'un enfant de 2 ans abandonné par son père, qui aurait pu dériver, vivre dans l'aigreur, la rancune. Il y avait heureusement tout à côté une mère rêveuse et romantique, et une grand-mère avec les pieds sur terre. L'enfant en question s'appelle Barack Obama. Il convoite aujourd'hui le poste de président des États-Unis.

Barack Obama est un politicien exceptionnel. Son ascension aussi rapide que spectaculaire a déjà sa place dans les livres d'histoire. Et s'il se retrouve aujourd'hui aux portes de la Maison-Blanche, c'est en grande partie à cause de... son père.

 

À cause, bien sûr, de ce qu'il a représenté pour lui. Mais aussi - et surtout - à cause des actes manqués de ce père, qui l'a littéralement abandonné.

«Chaque homme tente de se montrer à la hauteur des attentes de son père ou de ne pas répéter ses erreurs. Dans mon cas, les deux choses sont vraies», a expliqué le politicien à David Mendell, son biographe.

C'était en décembre 2003, lors de la première entrevue substantielle que Barack Obama a accordée à ce journaliste du Chicago Tribune, un homme à l'air discret qui devient intarissable lorsqu'il parle du sénateur de l'Illinois.

Dans son essai, intitulé Obama From Promise to Power, ce reporter répond à la question que pose rageusement John McCain depuis un certain temps: qui est le vrai Barack Obama?

Pour comprendre à la fois ce qui fait courir le politicien et ce qui lui a permis de se rendre si loin, il faut remonter à ses racines, nous explique le journaliste, rencontré dans un café du centre ville de Chicago.

Il faut remonter le fil de sa vie jusqu'à son enfance à Hawaii. Et examiner l'influence à la fois de ses parents et de ses grands-parents.

À commencer par son père, donc, qu'il n'aura pratiquement pas connu.

Barack Hussain Obama père a laissé tomber sa femme (et le petit Barack, alors âgé de 2 ans) en 1963, soit trois ans après l'avoir épousée à Hawaii. Il quitte sa famille d'abord pour se rendre au Massachusetts afin d'étudier à l'Université Harvard. Ensuite, une fois son diplôme obtenu, pour retourner refaire sa vie au Kenya.

Maman a raison

«Son père est parti, et sa mère n'a pas arrêté de lui dire à quel point ce père était un grand homme. Alors il a tenté d'aspirer aux idéaux qui, selon lui, représentaient son père», raconte David Mendell.

«Plus tard, il allait apprendre que son père avait fait fiasco, ajoute-t-il. Que c'était un homme très talentueux qui n'avait jamais pu faire ce qu'il avait voulu.» Obama fils allait donc tout faire pour sortir des ornières tracées par son paternel.

Ce père manquant a aussi été primordial par défaut. À cause de son absence, la mère de Barack Obama a pris une importance considérable.

«Elle a été la personne la plus importante dans sa vie, explique son biographe. Il se sert encore aujourd'hui des leçons qu'elle lui a inculquées alors qu'il était enfant.»

Cette mère, Ann Dunham, est née au Kansas en 1942. Lorsque ses parents, Stanley et Madelyn Dunham, ont quitté le continent américain pour l'île d'Hawaii, à la recherche d'une vie meilleure, elle les a suivis.

«L'optimisme contagieux (de Barack), c'est d'elle. Son inébranlable confiance en lui-même et en la vie, c'est aussi elle», dit David Mendell.

«C'était une personne très chaleureuse, très gentille, qui lui a appris que les gens sont bons. Elle croyait vraiment que les gens étaient naturellement bons. Elle était très optimiste, du style: oui on peut le faire», précise le biographe.

Le slogan Yes We Can, que Barack Obama répète depuis si longtemps, ce n'est donc pas du bluff. «Il a toujours eu une attitude très optimiste, assure David Mendell. Et lorsqu'on doit livrer un tel message, y croire de façon véritable, ça aide.»

Grand-maman aussi

Un tel discours aurait pu faire naître chez Obama une naïveté excessive. Mais sa grand-mère - qui a notamment pris en main l'éducation du jeune garçon alors que sa mère était en Indonésie - veillait au grain. Barack Obama vient d'ailleurs d'interrompre sa campagne pour se rendre au chevet de cette femme de 85 ans, qu'on dit gravement malade.

«La mère d'Obama était une rêveuse, une romantique qui voulait s'exiler pour étudier d'autres cultures. Et elle a tenté de jumeler ça avec le fait d'élever un enfant, ce que la grand-mère n'a jamais tout à fait compris parce qu'elle était une personne beaucoup plus pragmatique, avec les pieds sur terre», explique le biographe.

C'est donc avec sa grand-mère qu'il a appris à être sur ses gardes. Contrairement à sa mère, elle lui expliquait que «tout le monde n'est pas bon».

L'influence de ces deux femmes, à la fois opposées et complémentaires, a fait de Barack Obama ce qu'il est aujourd'hui. Un homme ambitieux, confiant et optimiste. En somme, résume David Mendell, un homme équilibré à la «personnalité yin et yang».

David Mendell prononcera une conférence le 30 octobre à 19h à l'Université de Montréal dans le cadre d'un colloque sur le choix du prochain président américain.

 

1961

En août, il naît à Hawaï.

1985

Il devient organisateur communautaire à Chicago.

1990

Il est le premier Afro-Américain à présider la Harvard Law Review.

1992

Mariage avec Michelle Robinson.

1996

Il est élu au Sénat de l'Illinois.

1999

Naissance de sa première fille, Malia Ann. Une deuxième, Natasha, naîtra en 2001.

2000

Il se présente à la Chambre des représentants du Congrès américain. Il est battu.

2004

En juillet, un discours est remarqué à la convention démocrate de Boston.

2004

En novembre, il est élu au Sénat des États-Unis.

2007

Le 10 février, il lance sa campagne présidentielle.