Entre eux, des membres de l'équipe de John McCain parlent de la campagne présidentielle au passé. D'autres, qui ont abandonné l'espoir de décrocher un emploi dans une administration républicaine, font circuler leur CV dans le secteur privé. D'autres encore, sous le couvert de l'anonymat, se jettent mutuellement le blâme dans les médias pour la défaite anticipée de leur candidat.

La presse américaine regorge ces jours-ci d'anecdotes qui laissent entendre qu'un pessimisme carabiné règne parmi l'entourage de John McCain et l'establishment républicain. Est-ce à dire que la course à la Maison-Blanche, à plus d'une semaine du fil d'arrivée, est déjà finie?

 

En jetant un coup d'oeil aux derniers sondages nationaux, on comprend le camp McCain d'être démoralisé. Rasmussen, l'un des sondeurs les plus sobres et fiables, donnait hier une avance de huit points à Barack Obama sur John McCain. Des études publiées la semaine dernière par les groupes New York Times/CBS News, Washington Post/ABC News, Wall Street Journal/NBC News et le Pew Research Center accordaient par ailleurs au candidat démocrate un avantage de 10 à 14 points.

«Les électeurs sont à l'aise vis-à-vis de Barack Obama», a déclaré Peter Hart, qui a réalisé le sondage Wall Street Journal/NBC News.

De fait, Barack Obama a progressé dans toutes les tranches de l'électorat, s'il faut se fier au sondage publié dans le nouveau numéro de l'hebdomadaire Newsweek, qui lui donne une avance de 12 points sur son adversaire. Le candidat démocrate mène désormais sur John McCain chez les 65 ans et plus (48-42), les hommes (52-42), les femmes (54-39) et même chez les Blancs de la classe ouvrière (46-44), ce qui représente un revirement spectaculaire par rapport au mois d'avril. À cette époque-là, John McCain le devançait par 18 points dans cette tranche de la population.

«Ces données, si elles tiennent, se traduiront par une victoire retentissante» de Barack Obama, a déclaré John Zogby mercredi dernier en commentant son sondage du jour, qui donnait à Barack Obama une avance de 10 points.

Incertitude

«Si» est évidemment le mot le plus important de cette déclaration. Il y a un an, rares étaient les commentateurs et analystes qui donnaient à John McCain une chance de remporter la course à l'investiture républicaine. À neuf jours du scrutin, le sénateur de l'Arizona peut ainsi s'accrocher au souvenir de sa spectaculaire remontée du printemps dernier ainsi qu'à la publication récente de deux sondages qui ne donnent à son adversaire qu'un seul point d'avance.

Une certaine incertitude continue donc de planer sur le résultat de l'élection présidentielle, malgré la morosité de certains membres de l'équipe de John McCain. Officiellement, le camp républicain s'évertue d'ailleurs à évoquer un scénario qui permettrait à son candidat de remporter une victoire à l'arraché. Pour que ce scénario se réalise, cependant, le sénateur de l'Arizona ne doit pas seulement triompher en Pennsylvanie, un État qui n'a pas voté pour un candidat républicain à la Maison-Blanche depuis 1988, mais également dans plusieurs États qui ont voté pour George W. Bush en 2004 et où Barack Obama est aujourd'hui en avance ou à égalité avec lui, à savoir la Floride, la Virginie, la Caroline-du-Nord, l'Ohio et l'Indiana.

Il va sans dire que les chances pour qu'un tel scénario se produise sont minces. David Plouffe, directeur de la campagne de Barack Obama, a calculé que John McCain devait, pour enlever la Pennsylvanie, remporter 15% des suffrages démocrates, 60% des suffrages indépendants et 95% des suffrages républicains. Il doute très fort de la possibilité d'un tel succès.

«Nous croyons que McCain accuse un retard de 20 points chez les indépendants, a-t-il dit. Nous sommes très forts chez les démocrates. Il est difficile de voir comment McCain peut récolter 15% de leurs votes.»

Il faut aussi noter que le camp Obama jouit de plusieurs avantages sur l'adversaire, en Pennsylvanie comme dans les autres États clés, dont ceux que procurent un budget publicitaire plus important et une meilleure organisation sur le terrain.

La course à la Maison-Blanche est-elle finie? Le pessimisme de certains républicains trouve évidemment sa contrepartie chez les démocrates. Paul Maslin, l'ancien sondeur d'Howard Dean, se range résolument dans le camp des optimistes. «Selon moi, à moins de revirements inattendus dans les 11 prochains jours, tout ce qui reste à déterminer est la marge de la victoire et si, comme les sondages le laissent entendre, nous nous dirigeons vers un raz-de-marée», a-t-il écrit vendredi sur le site internet Salon.

 

Sarah Palin bouc émissaire?

Des conflits internes ont éclaté dans l'équipe de campagne républicaine à propos du rôle de Sarah Palin, qui accuse les conseillers de John McCain de lui faire par avance porter le chapeau d'une éventuelle défaite le 4 novembre, a rapporté hier le site internet Politico. Selon ce site, qui cite quatre personnalités républicaines proches de la candidate républicaine à la vice-présidence des États-Unis, celle-ci est exaspérée par les remarques des conseillers de la campagne républicaine, accusés par ses militants d'être à l'origine d'une série de gaffes dans sa communication.