Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) affirme dans un rapport confidentiel que des personnels médicaux ont participé à des interrogatoires de la CIA relevant de la torture, en violation des règles déontologiques de la médecine, rapporte la presse américaine.

«La première intention des personnels médicaux semble avoir été d'être utiles aux procédures d'interrogatoires, et non au patient», assure le CICR dans ce rapport mis en ligne lundi par le site The New York Review of Books.

Des premières conclusions de ce document, dévoilé en mars par la presse américaine, avaient montré que les traitements infligés aux personnes soupçonnées de terrorisme dans les prisons secrètes de la CIA relevaient de la «torture»: coups, privations de sommeil, expositions à des températures extrêmes, simulations de noyade...

Selon les nouvelles révélations, des personnels médicaux étaient présents lors de ces interrogatoires, surveillant l'état de santé des détenus alors que leur étaient infligés des mauvais traitements.

Ils «donnaient des instructions pour poursuivre, cesser ou modifier» les interrogatoires, assure le rapport, qui s'appuie sur les conclusions de responsables du CICR qui ont pu rencontrer des détenus des prisons de la CIA, membres présumes d'Al-Qaïda, après leur transfert en 2006 dans le camp de prisonniers de Guantanamo, sur l'île de Cuba.

Un des détenus a ainsi affirmé «qu'à plusieurs occasions, des simulations d'asphixie ont été arrêtées sur intervention» d'équipes de santé présentes dans la pièce. A l'inverse, celles-ci pouvaient «recommander» la poursuite de tels traitements.

«Je m'occupe de ta santé seulement parce qu'on a besoin de tes informations», aurait par ailleurs lancé un membre de ces équipes à un détenu.

Le CICR rappelle dans son rapport que la pratique de la médecine obéit à des principes déontologiques: respect de la dignité du malade, recherche de l'amélioration de sa santé, interdiction des mauvais traitements.

Le CICR conclut que «la participation du personnel médical» dans le cadre de ces interrogatoires «constituent une violation flagrante de l'éthique médicale, et s'apparente dans certains cas à une participation à la torture et/ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants».

Au moins cinq copies du rapport ont été réalisées et diffusées auprès de hauts responsables de la CIA et de la Maison Blanche en 2007, mais interdits de diffusion auprès du public par le CICR, censé garder sa neutralité dans les conflits.

Le CICR n'a pas contesté l'authenticité du rapport, mais regretté sa diffusion.

Interrogée en mars par l'AFP sur la pratique de torture, la CIA avait refusé de réagir. A mesure qu'elles ont été révélées, les méthodes utilisées par l'agence de renseignement dans le cadre de la «guerre contre le terrorisme» de l'ancien président américain George W. Bush n'ont cessé de faire scandale.