Un sergent de l'armée américaine habitué aux rues dangereuses de Bagdad travaille maintenant chez Google. Le choc culturel ne pourrait être plus grand, rapporte notre correspondant.

La journée du 20 avril restera gravée dans la mémoire du sergent Dale Sweetnam. C'est le jour où il est arrivé chez Google.

 

«La première chose qui m'a frappé, c'est la façon dont les gens étaient habillés, dit-il. Tout le monde avait l'air cool. Je me suis dit «Oh boy, je vais devoir aller magasiner ce soir.» «

Durant ses quatre années passées dans l'armée, dont treize mois en Irak, M. Sweetnam a dû vivre avec la présence d'un ennemi invisible, traverser des tempêtes de sable, et patrouiller au-dessus de Bagdad et de Bassora à bord d'hélicoptères Black Hawk. Ces jours-ci, le sergent Sweetnam relève un nouveau type de défi. Durant sa première semaine chez Google, il s'est battu à mains nues contre une lampe «lava» qui refusait de s'allumer. Il s'est familiarisé avec les matchs de ballon chasseur en fin d'après-midi. Il a découvert qu'il n'avait pas besoin de répondre «Roger» quand on lui demandait d'accomplir une tâche.

M. Sweetnam a aussi dû réapprendre à sourire, un trait de caractère qui n'est pas encouragé dans l'armée. «J'avais une attitude très directe, très efficace, explique-t-il. Au bout de quelques jours, les gens m'ont dit: «Hé, tu peux relaxer. C'est correct.»»

Pendant la prochaine année, M. Sweetnam travaillera dans le département des relations publiques de Google, au Googleplex de Washington. Son rôle est de tout assimiler «comme une éponge» et d'appliquer ses nouvelles connaissances à son retour dans l'armée.

Cet été, M. Sweetnam travaille sur le projet Google Voice, un programme qui permet aux usagers d'obtenir un numéro de téléphone Google qui les suit au travail, sur la route, ou à la maison. L'usager possède ainsi un seul numéro, et une seule boîte vocale dont les messages peuvent être entendus via l'internet, ou même retranscrits automatiquement en format texte, comme un courriel.

Ce nouveau service est offert en priorité aux familles de militaires déployés outre-mer, pour qui rester en contact est complexe. «J'ai vécu la frustration de ne pas pouvoir joindre mes proches quand j'étais en Irak. Je sais que les petites choses peuvent faire la différence.»

Habitué à se lever à 6h du matin et à avoir une journée planifiée à l'avance, M. Sweetnam vit désormais dans un monde qui lui semble parfois irréel, dit-il.

«L'armée vous prépare à faire face à tout. Cela dit, la culture de Google est à l'opposé de celle de l'armée. Comme soldat, on nous apprend à vivre selon des règles. Chez Google, tout ça fout le camp. Les tâches changent continuellement. Les objectifs sont plus abstraits. Au début, ça peut être étourdissant.»

Depuis son arrivée chez Google, M. Sweetnam fait part de ses réflexions dans son blogue, The Army Journalist. On peut y saisir la mesure de son étonnement. «Aujourd'hui, vendredi, nous avons eu du temps de récréation au travail, écrit-il, incrédule. Le chef cuisinier de Google a apporté des pizzas, des croquettes de poulet, des boîtes de jus. Nous avons joué au ballon chasseur. Ensuite, nous avons écouté des vidéos de Michael Jackson. Incroyable.»

http://thearmyjournalist.blogspot.com