Les relations houleuses entre l'Église catholique américaine et la famille Kennedy ont tourné à la guerre ouverte lundi autour du refus de la communion opposé à Patrick Kennedy en raison de son soutien à l'avortement.

Dans un entretien publié dans le quotidien Providence Journal lundi, Mgr Thomas Tobin, l'évêque du Rhode Island (nord-est) indique qu'en février 2007 il a prié Patrick Kennedy, qui représente cet État à la Chambre des représentants, de s'abstenir de communier.

Patrick Kennedy, neveu de John Fitzgerald Kennedy, qui fut le premier président catholique des États-Unis, est le fils du sénateur Ted Kennedy, décédé cet été.

«Mgr Tobin m'a ordonné de ne pas recevoir la communion et m'a dit qu'il avait donné l'ordre aux prêtres du diocèse de ne pas me la donner», a expliqué M. Kennedy dimanche dans le Providence Journal.

Mgr Tobin, dans sa réponse publiée lundi par le même quotidien, nie lui avoir purement et simplement interdit la communion, expliquant qu'il l'a simplement prié de s'en abstenir.

La position défendue par l'évêque illustre en tout cas l'interventionnisme de l'Eglise catholique américaine dans le débat sur l'avortement et d'autres sujets de société sensibles.

Et sa conversation avec Patrick Kennedy, déjà ancienne, refait surface au moment où les deux hommes s'affrontent ouvertement à propos de l'opposition de l'Église à tout financement public des interventions volontaires de grossesse dans le plan de réforme du système de santé du président Obama.

«Si l'Église défend le droit à la vie, elle devrait être en faveur de la réforme du système de santé, qui fournira une couverture permettant de maintenir les gens en vie», a déclaré Patrick Kennedy le mois dernier au Catholic News Service, l'organe d'information de l'Église catholique américaine.

M. Kennedy a voté pour le plan de la réforme de la santé adopté début novembre par la Chambre des représentants, mais s'est opposé à un amendement --qui a néanmoins été adopté--, restreignant la couverture santé en cas d'IVG.

Si les Kennedy sont la famille catholique la plus célèbre des États-Unis, ils ont toujours entretenu des relations compliquées avec l'Eglise.

Ted Kennedy a été enterré en août après des obsèques catholiques somptueuses à Boston, bien qu'il ait été un défenseur influent du droit à l'avortement.

Certains catholiques s'en étaient offusqués, mais le cardinal de Boston, Sean O'Malley, avait justifié sa participation à la cérémonie en déclarant que «si une cause est motivée par le jugement, la colère ou l'esprit de vengeance, elle est vouée à la marginalisation et à l'échec».

Patrick Kennedy n'est pas seul dans son cas. Le sénateur John Kerry, un autre catholique favorable au droit à l'avortement, avait été averti par certains évêques lors de sa candidature à la présidentielle de 2004 qu'ils ne lui donneraient pas la communion. Plus récemment, la même mésaventure est arrivée à la ministre de la Santé, Kathleen Sebelius.

Et des débats similaires agitent l'Eglise à propos du mariage gay. La hiérarchie catholique fait ainsi pression sur le gouvernement de l'État de New York, apparemment avec succès, pour empêcher que n'y soit adoptée une loi autorisant le mariage homosexuel.

L'ancien gouverneur démocrate de New York Mario Cuomo --un catholique-- a mis en garde récemment contre le risque que la pression de l'Eglise ne finisse par empêcher les hommes politiques d'être élus.

Mgr Tobin n'en a pas moins défendu sa position face à Patrick Kennedy, expliquant sur son site Internet qu'il se préoccupait «uniquement de son bien-être spirituel».