L'annonce ne permettra pas à Barack Obama de réaliser une de ses premières promesses en tant que président - fermer la prison de Guantánamo en janvier 2010 -, mais elle constitue une étape importante vers le dénouement de ce dossier épineux.Le président des États-Unis a ordonné que le gouvernement achète une prison d'État ouverte il y a huit ans à Thomson, une municipalité rurale de l'Illinois, où devraient être transférés un maximum de 100 des 210 suspects de terrorisme détenus à Guantánamo.

La Maison-Blanche a annoncé cette décision dans une lettre adressée au gouverneur démocrate de l'Illinois, Pat Quinn, qui a milité en faveur du changement de vocation du centre de détention sous-utilisé de Thomson. Il y voyait une façon de créer quelque 3000 emplois directs et indirects dans une région qui en a besoin. La missive, signée par le secrétaire à la Défense, Robert Gates, la secrétaire d'État, Hillary Clinton, et le ministre de la Justice, Eric Holder, précise que «le président n'a aucune intention de libérer quelque prisonnier que ce soit aux États-Unis».

Opposition vigoureuse

Mais l'opposition au transfert de détenus de Guantánamo vers les États-Unis demeure vigoureuse. Avant même que la Maison-Blanche ne diffuse la lettre, le chef de file de la minorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, a critiqué la décision de l'administration démocrate.

«L'administration n'a pas réussi à expliquer comment le transfert de terroristes dans un Guantánamo du Nord placerait davantage les Américains en sécurité que de les garder loin de nos côtes dans une prison à Cuba», a-t-il déclaré dans un communiqué.

Le représentant républicain Mark Kirk, candidat à l'ancien siège de Barack Obama au Sénat, a également affirmé que ce transfert de détenus constituait un «risque inutile».

L'administration Obama fait valoir dans sa lettre au gouverneur de l'Illinois que le périmètre de sécurité qui entourera le centre de détention de Thomson excédera les «critères de sécurité de la seule prison «supermax» du pays à Florence, au Colorado, où il n'y a jamais eu d'évasion ou d'attaque de l'extérieur».

Enfermés indéfiniment

Un responsable de l'administration a également affirmé que la fermeture de Guantánamo améliorera la sécurité nationale «en retirant à Al-Qaeda un outil de recrutement majeur».

La prison à sécurité maximale de Thomson contient 1600 lits, dont environ 200 sont occupés. Il faudra environ six mois pour modifier le centre de détention afin de pouvoir y accueillir des prisonniers fédéraux et des détenus de Guantánamo, a précisé un responsable américain.

Une partie de la prison sera gérée par le ministère de la Justice, l'autre par le département de la Défense. Certains détenus, dont le Canadien Omar Khadr, y auront un procès devant un tribunal militaire d'exception conçu pour juger les «crimes de guerre». D'autres pourraient y rester enfermés indéfiniment, au dam des groupes de défense des libertés.

Et les autres détenus?

L'acquisition de la prison de Thomson par le gouvernement fédéral est loin de mettre un terme au casse-tête que constitue la fermeture du centre de détention de Guantánamo. Un maximum de 100 suspects de terrorisme sont susceptibles d'être transférés dans l'Illinois sur un total de 210 détenus. C'est donc dire que l'administration Obama devra relâcher ou extrader plus de 100 détenus vers leurs pays d'origine ou des pays tiers. Jusqu'ici, elle a libéré 30 détenus. Six autres ont été renvoyés devant un tribunal fédéral à New York, dont cinq hommes accusés d'avoir organisé les attentats du 11 septembre 2001.