Les maisons closes de l'État américain du Nevada innovent après une décision de justice qui autorise, pour la première fois aux États-Unis, les hommes à exercer le plus vieux métier du monde.

Le Shady Lady Ranch, une petite maison de passe située à environ 240 km de Las Vegas, où travaillent actuellement quatre prostituées, reçoit désormais les candidatures masculines sur son site Internet, après le feu vert de l'organisme local gérant les licences de prostitution.

«Ma femme voulait essayer, alors j'ai dit OK», explique à l'AFP Jim Davis, un architecte retraité de 78 ans, propriétaire depuis 17 ans du Shady Lady Ranch avec sa femme. «On ne sait pas si ça va marcher ou pas, mais ça va être drôle de le découvrir», ajoute-t-il.

Le Nevada est le seul état américain dans lequel la prostitution est légale, une autorisation assortie de visites médicales obligatoires. Les Davis ont convaincu les services de santé du Nevada d'établir un contrôle équivalent pour les hommes.

La prostitution reste néanmoins interdite dans les comtés de plus de 100 000 habitants, ce qui exclut - officiellement - Las Vegas et Reno, les deux grandes villes de l'État. La frontière du comté de Nye, où se trouve le Shady Lady ranch, est à une centaine de kilomètres de la capitale du jeu.

Bobbi, 55 ans, la femme de Jim Davis a déjà reçu des centaines de candidats et espère en embaucher un ou deux d'ici la fin janvier.

Plusieurs gigolos et acteurs pornographiques ont envoyé leur CV - avec photos - mais Bobbi assure chercher des hommes qui puissent aussi charmer les clientes et pas seulement les satisfaire sexuellement. «Ils doivent être capables de rire aux blagues d'une femme», dit-elle.

Car que les choses soient bien claires: Bobbi vise une clientèle féminine et cherche des prostitués hétérosexuels. Si les clients s'avèrent être majoritairement des hommes à la recherche de relations homosexuelles, les Davis mettront un terme à l'aventure.

«À cause de la loi, si un homme demande un homme, nous sommes obligés de le satisfaire», déplore M. Davis. «Ceci dit, il en va de même qu'avec nos filles. Tout(e) prostitué(e) peut refuser de faire quelque chose avec un client».

Se lancer dans la prostitution masculine n'est pas une idée nouvelle. En 2005, déjà, la célèbre Heidi Fleiss, qui offrait les services de prostituées à la fine fleur d'Hollywood, avait annoncé son projet d'ouvrir une maison de passe masculine dans le comté de Nye. Mais ses démêlés judiciaires lui avaient empêché d'obtenir sa licence.

D'autres maisons closes voient d'un mauvais oeil l'arrivée de prostitués, car ils craignent qu'elle ne favorise la prostitution homosexuelle et amène les autorités de l'État à interdire purement et simplement les «belles de nuit».

Dennis Hof, propriétaire du Moonlite Bunny Ranch, n'a pas cette crainte, car il pense qu'il n'y a pas de marché pour la prostitution masculine.

«Quelle femme avec de l'argent va vouloir aller à trois ou quatre heures de chez elle pour faire ça ? Aucune. Dans un an, quand on fera le bilan, on va bien rire», s'exclame-t-il.

Les Brandt, un comédien qui était candidat en 2005 au projet d'Heidi Fleiss -- mais qui a aujourd'hui choisi de s'en tenir au métier d'acteur -- assure en revanche que la demande existe.

«Certaines femmes ont besoin de payer pour l'affection qui les fait se sentir humaines», dit-il. «Et il y a des gens qui sont désireux de les satisfaire».