Ébranlé par la victoire républicaine à l'élection partielle du Massachusetts, Barack Obama a laissé entendre hier qu'il était prêt à réduire ses ambitions pour sauver ce qui peut l'être de sa réforme du système de santé.

«Il est très important que le peuple américain examine ce projet et comprenne que la campagne de peur dont celui-ci a été l'objet est fondée sur des faussetés», a déclaré le président lors d'une entrevue à la chaîne de télévision ABC. «Je pense que nous devons procéder rapidement pour arriver à un consensus autour des éléments du projet sur lesquels les gens sont d'accord.»

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Et d'ajouter: «Nous savons que nous avons besoin d'une réforme de l'assurance santé, que les compagnies d'assurance prennent avantage des gens. Nous savons que nous devons réduire les coûts de santé, faute de quoi notre budget va exploser, et nous savons que les PME ont besoin d'aide afin de fournir une couverture médicale à leurs familles. Ce sont les éléments essentiels d'une réforme.»

Tout en refusant d'enterrer sa réforme de la santé, le président démocrate s'est opposé à ce que les sénateurs démocrates l'adoptent avant la prestation de serment du républicain Scott Brown, vainqueur de l'élection sénatoriale du Massachusetts face à la démocrate Martha Coakley.

«Le Sénat ne doit surtout pas tenter de faire passer quoi que ce soit en vitesse avant que Scott Brown n'ait pris son siège, a-t-il déclaré à ABC. Le peuple du Massachusetts s'est exprimé. Il a le droit de participer au processus.»

Sur un plan personnel, Barack Obama a réagi à la claque que constitue la perte du siège d'Edward Kennedy, en regrettant d'avoir perdu le contact avec la population américaine au cours de la première année de son mandat.

Regrets

«S'il y a une chose que je regrette de cette année, c'est que nous avons été tellement occupés à agir et à gérer les crises urgentes que nous avons en quelque sorte perdu le sens du contact direct avec les Américains sur leurs valeurs essentielles», a-t-il dit.

L'élection de Scott Brown met fin à la super majorité de 60 sièges dont jouissaient les démocrates au Sénat. À titre de 41e sénateur républicain, l'élu du Massachusetts pourra permettre à son parti d'utiliser une manoeuvre parlementaire appelée filibuster, et de faire échouer les réformes voulues par le président et ses alliés démocrates du Congrès.

Le chef de file de la minorité républicaine du Sénat, Mitch McConnell, a exprimé le souhait que la réforme du système de santé ne survive pas à la victoire de Brown, inimaginable il y a deux semaines.

«Les électeurs du Massachusetts, comme les Américains partout ailleurs, ont très clairement indiqué quelle était leur position sur la réforme de la santé. Ils ne veulent pas de ce projet de loi et ils veulent être entendus par Washington», a déclaré le sénateur McConnell.

Barack Obama a offert une autre interprétation du verdict du Massachusetts, un bastion démocrate où il a remporté 62% des suffrages en 2008.

Frustration de l'électorat

«Voici mon analyse non seulement du vote au Massachusetts, mais également de l'humeur du pays: le phénomène qui a porté Scott Brown au pouvoir est le même qui m'a porté au pouvoir, a-t-il déclaré à ABC. Les gens sont mécontents, ils sont frustrés. Pas juste à cause de ce qui est arrivé au cours de la dernière année ou des deux dernières années, mais ce qui est arrivé au cours des huit dernières années.»

Même si l'arrivée d'un 41e sénateur républicain compromet son programme, le président a indiqué que le Congrès n'était pas le seul moyen pour lui d'arriver à ses fins.

«Ici, dans la capitale de notre pays, il existe plusieurs façons de promouvoir ses idéaux et les intérêts des Américains. Souvent, cela se fait au Congrès. Mais cela peut aussi se faire par décret», a déclaré Barack Obama hier matin à la Maison-Blanche en signant un ordre présidentiel destiné à lutter contre la fraude fiscale des entreprises.