Bob Schulz, fondateur de l'organisation «patriote» We the People, n'a même pas tenté de cacher sa satisfaction à la suite de l'attentat-suicide de Joe Stack, ce pilote qui a précipité son avion sur un édifice de l'Internal Revenue Service (IRS) et tué un de ses employés à Austin, au Texas, le 18 février, après avoir publié sur l'internet une longue diatribe contre le gouvernement fédéral et son agence des impôts qui l'a transformé en héros aux yeux de certains extrémistes.

«Il y a un énorme mouvement patriote», s'est réjoui Schulz, dont l'organisation ne dénonce pas seulement l'IRS, mais également la Réserve fédérale et Barack Obama, considérant sa présidence illégitime du fait qu'il ne serait pas né aux États-Unis. «Cela fait 30 ans que je fais ce genre de travail et je n'ai jamais rien vu de pareil. C'est enchanteur.»

Le phénomène n'a rien d'enchanteur aux yeux de la Southern Poverty Law Center (SPLC), mais il est bien réel. Le nombre de groupes patriotes ou de milices d'extrême droite a plus que triplé l'an dernier aux États-Unis, selon l'étude annuelle publiée la semaine dernière par l'association de défense des droits civiques. Celle-ci a dénombré 419 «groupes patriotes activistes» en 2008, contre 512 en 2009, dont 127 milices paramilitaires, contre 42 l'année précédente, une «explosion» attribuée en partie à l'élection du premier président noir de l'histoire américaine et à la crise économique.

«Il s'agit d'un mouvement qui voit dans l'État l'ennemi public numéro un et qui se laisse entièrement dévorer par tout un tas de théories sur des complots présumés», dit Mark Potok, directeur de l'Intelligence Report au SPLC.

Selon cette étude, le nombre de groupes professant la haine des Noirs, des juifs et des homosexuels, entre autres, est passé de 602 à 932 de 2000 à 2009.

«Un autre Oklahoma City est une possibilité très réelle», dit Potok, qui est souvent accusé d'alarmisme par ses critiques.

Mais, selon le SPLC, l'attentat-suicide d'Austin n'était que le dernier acte de violence d'une série incluant, depuis l'investiture de Barack Obama, les meurtres de six policiers par des extrémistes de droite, des projets d'assassinat du président par des skinheads et des tentatives d'attentat à la bombe par des individus épousant des idées antigouvernementales, racistes ou survivalistes.

Selon le SPLC, cette «rage» antigouvernementale est de plus en plus légitimée par des vedettes de médias conservateurs, dont l'animateur de Fox News Glenn Beck, et même par des politiciens, qui propagent des idées issues du mouvement patriote. La représentante républicaine du Minnesota Michele Bachmann a notamment exprimé sa peur de voir le président Obama créer des «camps de rééducation» politique pour les jeunes.