Des pénuries de médicaments essentiels, notamment des anticancéreux, sont un problème grandissant aux États-Unis qui inquiète hôpitaux, médecins et malades, mobilisant les autorités fédérales, des associations privées et le Congrès.

Selon un récent rapport de la FDA, l'agence américaine des médicaments, le nombre de traitements très importants et difficiles ou impossibles à trouver a triplé de 2005 à 2010, passant de 61 à 178.

La plupart sont donnés aux malades dans les hôpitaux sous forme d'injections ou d'intraveineuses.

Les traitements les plus fréquemment concernés sont des anticancéreux, les anesthésiants ainsi que des antibiotiques, explique Valerie Jensen, une pharmacienne à la FDA.

La plupart de ces produits sont des génériques bon marché et efficaces.

«La FDA est informée par les malades, les professionnels des soins et les organisations de défense des conséquences terribles de ces pénuries», assure Shelly Burgens, une porte-parole de la FDA.

«Nous continuons à faire tout ce que nous pouvons pour pallier à ces déficiences», a-t-elle dit dans un courrier électronique à l'AFP.

Mais la FDA n'a pas le pouvoir de forcer une firme à produire un médicament et ne peut l'obliger à informer l'agence à l'avance de son intention de mettre fin à la production de tel ou tel produit, souligne cette porte-parole.

Une enquête menée en juin par l'American Hospital Association auprès de 820 centres hospitaliers américains a révélé que quasiment tous avaient connu une pénurie d'au moins un médicament important les six mois précédents.

Plus de 80% de ces hôpitaux ont dû retarder des traitements de malades tandis que 70% ont donné à leurs patients des médecines moins efficaces et 80% en ont rationné ou restreint l'accès.

«Nous devons vraiment nous pencher très sérieusement sur ce problème pour voir ce qui se passe», explique à l'AFP Mike Cohen, un pharmacien de  l'Institute for Safe Medical Practices, un organisme indépendant à but non-lucratif qui informe les médecins et le public sur les pratiques médicales souhaitables.

«Je n'ai jamais vu ça depuis que je suis pharmacien», ajoute-t-il, citant une enquête de 2010 faite par son organisation auprès de 1.800 professionnels de la santé.

Les résultats montrent qu'un tiers des médecins et le cinquième des pharmaciens avaient connaissance de réactions néfastes, y compris de décès, que la pénurie a provoquées chez leurs patients.

«Une grande partie de ces pénuries s'explique par des problèmes de qualité au niveau de la production: un nombre grandissant de médicaments proviennent de l'étranger, forçant les laboratoires à arrêter de les produire», explique Cynthia Reilly, une responsable à l'American Society of Health System Pharmacists, un organisme à but non-lucratif.

En outre, du fait de l'importante consolidation du secteur pharmaceutique ces dernières années, on se retrouve parfois avec une ou deux firmes fabriquant le même médicament, dit-elle à l'AFP.

Il y a aussi des laboratoires qui cessent de produire un médicament générique car peu rentable, a noté Cynthia Reilly.

Selon elle, une nouvelle réglementation fédérale plus stricte donnant l'autorité nécessaire à la FDA pour forcer les firmes à donner un préavis de six mois avant d'arrêter la production d'un médicament «peut vraiment améliorer la situation».

Deux projets de loi sont examinés au Congrès.

Enfin le «marché gris» (marché de produits véritables, importés et vendus à des prix supérieurs à leur prix d'origine) de ces médicaments est un autre problème aggravant les effets de ces pénuries. Bien que cette distribution de produits soit légale, elle n'est pas autorisée par le laboratoire qui les produit.

Des distributeurs peu scrupuleux raflent autant de médicaments difficiles à trouver qu'ils le peuvent pour les revendre au prix fort parfois jusqu'à mille fois plus, aux hôpitaux pris à la gorge.