(Washington) La chambre basse du Congrès américain se prononce vendredi sur une proposition de loi visant à rayer le cannabis de la liste fédérale des drogues dangereuses, un pas historique vers sa dépénalisation déjà effective dans de nombreux États.

C’est la seconde fois que le texte, baptisé More Act, est présenté à la chambre des représentants. Il avait été approuvé en décembre 2020 par la majorité démocrate, mais n’avait pas été introduit au Sénat, alors contrôlé par les républicains.

Il décriminaliserait au niveau fédéral la possession, la vente et la production de cannabis, actuellement considéré par l’agence de lutte antidrogue (DEA) comme équivalent au LSD, à la cocaïne ou à l’héroïne, même si plus des trois quarts des États américains ont légalisé la consommation de cannabis pour usage médical, et un tiers pour un usage récréatif.

Il annulerait également les condamnations fédérales pour les infractions mineures à la législation sur les stupéfiants, qui entraîne selon les défenseurs du texte des incarcérations de masse touchant surtout les minorités.  

Le texte « considère la marijuana comme une question de santé publique plutôt que de criminalité et servirait à corriger le lourd bilan provoqué par sa criminalisation dans les communautés défavorisées et de couleur », a assuré le démocrate Jerrold Nadler, principal auteur de la proposition.

Pour Aaron Smith, de l’Association nationale de l’industrie du cannabis (NCIA), la loi permettra également que « les petites entreprises et les membres des communautés marginalisées qui ont été victimes de manière disproportionnée par l’interdiction puissent bénéficier des opportunités créées par un marché régulé du cannabis ».

Réforme populaire

La prohibition de la marijuana au niveau fédéral freine l’expansion de sa production et de son commerce légal.

Selon le site d’information procannabis Leafly, le secteur, en plein essor, pesait 25 milliards et employait 321 000 personnes en 2021. Mais les banques restent réticentes à financer les producteurs ou les vendeurs de crainte d’être poursuivies pour blanchiment d’argent.

De plus, les partisans du texte dénoncent le coût financier et humain, de la guerre contre la drogue lancée dans les années 1980 par les autorités américaines.

Les opposants au texte insistent quant à eux sur les dangers de la dépendance, notamment chez les jeunes, et des accidents de la route par des conducteurs sous influence.

« Beaucoup de gens consomment du cannabis, quand il sera légalisé au niveau fédéral, encore plus de gens en consommeront et le niveau de danger augmentera », a affirmé Cliff Bentz, élu républicain de l’Oregon, l’un des principaux États producteurs.

Le texte instaurerait aussi une taxe de 5 % sur la vente de cannabis et ses dérivés, pour financer les soins et la réinsertion de victimes, majoritairement afro-américaines, de la guerre contre la drogue.

La réforme est très populaire aux États-Unis. Selon un sondage de l’institut de recherches Pew l’année dernière, 91 % des Américains étaient en faveur d’une légalisation du cannabis.  

Mais en pratique, si la loi devait être adoptée, le cannabis ne serait pas pour autant légal dans tout le pays, les différents États américains restant maîtres de leur législation antidrogue.

Le cannabis est déjà légal dans certains pays du monde, et en décembre 2020, la Commission des stupéfiants de l’ONU avait également retiré le cannabis de sa liste des drogues les plus dangereuses, sur laquelle il figurait depuis 59 ans et qui décourageait son utilisation à des fins médicales.