(Washington) L’agression violente du mari de la cheffe démocrate Nancy Pelosi a renforcé les inquiétudes sur la possibilité que la désinformation et les profondes divisions politiques ne débouchent sur des actes violents, à l’approche des élections américaines de mi-mandat.

Des responsables pensent que ces éléments sont le moteur de certaines attaques – comme celle commise par un adepte de théories du complot, qui a voulu enlever la cheffe des démocrates au Congrès Nancy Pelosi à cause de ses « mensonges », et a agressé son mari.

Le suspect, David DePape, relayait en ligne des thèses douteuses sur des sujets aussi variés que la fraude électorale, les vaccins anti-COVID-19, le changement climatique, l’Holocauste ou encore les personnes transgenres.

Cette attaque s’est produite à un peu plus d’une semaine d’élections de mi-mandat déterminantes, dans un climat tendu. Certains agents électoraux et élus ont dit avoir constaté une hausse des menaces et intimidations.

En Arizona, des hommes armés ont patrouillé autour d’une boîte où les électeurs peuvent déposer leur bulletin de vote par anticipation, inquiétant les votants.

Vendredi, le jour de l’attaque au domicile du couple Pelosi, des agences américaines chargées de la sécurité ont averti de la « menace accrue » posée par les extrémistes violents, notamment alimentée par leur conviction de l’existence de fraudes électorales.  

Trump

Les craintes de violence politique ont crû aux États-Unis depuis que Donald Trump a refusé d’accepter sa défaite en novembre 2020, à l’origine de l’assaut du Capitole, le 6 janvier 2021.

Depuis, la tension n’a pas vraiment baissé dans la rhétorique politique, en partie en raison du poids des soutiens de Donald Trump au sein du parti républicain et de ses allégations sur de prétendues fraudes de la part des démocrates lors des prochaines élections.

En déplacement au Texas la semaine passée, l’ancien président a recommandé à ses fans de ne pas croire le résultat des urnes, traité Nancy Pelosi de « folle » et accusé « Biden et les dingues d’extrême gauche » de « mener une guerre » contre le Texas.

Ils « font de l’Amérique un État policier », a-t-il encore déclaré, répétant, contre toute évidence, que « le 6 janvier a été provoqué par une élection volée ».

Les deux partis visés

Rien de similaire à l’assaut du Capitole ne s’est reproduit. Mais entre nombre d’incidents isolés et quantité de désinformation sur les réseaux sociaux, les responsables ont de quoi s’inquiéter.

En juin, un homme armé s’est rendu au domicile de Brett Kavanaugh, juge à la Cour suprême, mécontent de sa décision sur l’avortement.

En juillet, un homme armé a menacé l’élue démocrate Pramila Jayapal, chez elle à Seattle. Le même mois, un ancien militaire souffrant d’alcoolisme et de syndrome post-traumatique a tenté d’agresser au couteau Lee Zeldin, candidat républicain au poste de gouverneur de l’État de New York.

Eric Swalwell, un élu démocrate de Californie visé par de nombreuses menaces, pointe directement la responsabilité des plus fervents défenseurs de Donald Trump, surnommé selon son slogan, « Make America Great Again », ou « MAGA ».

« La violence politique des MAGA est à son pic en Amérique, et ça va tuer quelqu’un », avait-il écrit en août, en demandant aux responsables républicains de le dénoncer.

 Désinformation endémique

S’ajoutent à cela des menaces visant les employés chargés de l’organisation du scrutin, pointés du doigt par Donald Trump et ses partisans en 2020.

Certaines autorités locales éprouvent ainsi des difficultés à recruter du personnel pour tenir les urnes.

Dans l’Arizona, où les tensions autour de l’élection prétendument volée de 2020 étaient particulièrement fortes, des personnes armées munies de caméras ont surveillé une boîte métallique où les électeurs pouvaient déposer leur bulletin de vote.

De telles actions « soulèvent des inquiétudes sérieuses portant sur de l’intimidation électorale », a estimé le département de la Justice devant un tribunal fédéral.

S’ajoute à ce climat tendu quantité de désinformation en ligne, un terreau favorable à la violence selon les responsables à Washington.

Dimanche, le plus haut responsable américain sur la cybersécurité a parlé d’un climat violent favorisé par « une désinformation endémique » et des « menaces de harcèlement, d’intimidation et de violence contre les responsables des scrutins, les bureaux de vote et les électeurs ».

La désinformation, a déclaré sur CBS Jen Easterly, directrice de l’Agence de cybersécurité et de sécurité des infrastructures (CISA), « peut saper la confiance dans le système électoral et être utilisée pour inciter à la violence ».