(Washington) Le président Joe Biden a salué mercredi un « bon jour pour la démocratie » au lendemain des élections de mi-mandat, où son parti démocrate a résisté à la « vague » républicaine annoncée, même s’il devra probablement affronter une Chambre des représentants à majorité républicaine.

« Nous avons eu une élection hier. Et ce fut un bon jour, je pense, pour la démocratie. Et je pense que ce fut un bon jour pour l’Amérique », a affirmé le président lors d’une conférence de presse à la Maison-Blanche, se félicitant que le scrutin se soit déroulé « apparemment sans interférences ».

Il a aussi redit « avoir l’intention » de briguer un second mandat en 2024, précisant qu’il le confirmerait « en début d’année prochaine ».

Alors que les résultats définitifs des élections ne sont pas encore connus, Joe Biden savourait visiblement la bonne performance des démocrates et envoyait un message de fermeté aux républicains.

« Alors que la presse et les experts prédisaient une vague rouge géante, cela ne s’est pas produit », a-t-il souligné, en allusion à la couleur du parti républicain, tout en reconnaissant « la frustration » de nombreux électeurs, face à l’inflation notamment.

Joe Biden s’exprimait au lendemain d’élections de mi-mandat au cours desquelles son parti a limité la casse dans un scrutin traditionnellement difficile pour le parti au pouvoir, qui étaient vues comme un test pour son avenir politique.

Le dirigeant démocrate s’est dit « prêt à travailler avec l’opposition républicaine », affirmant être ouvert à toutes les « bonnes idées », mais il a fixé plusieurs lignes rouges sur la sécurité sociale, l’avortement ou encore le changement climatique.

Près de 24 heures après la fermeture des premiers bureaux de vote, l’Amérique attendait encore de connaître le sort de plusieurs scrutins décisifs et très disputés, comme en Arizona ou dans le Nevada.

Mais les républicains étaient bien placés pour prendre, certes de justesse, le contrôle de la Chambre des représentants, tandis que le sort du Sénat restait en suspens.

Prudents, les grands médias américains se gardaient d’annoncer leurs projections pour le contrôle des 435 sièges à la Chambre des représentants, la majorité se situant à 218.

« Décevants » dit Trump

La « vague rouge » escomptée par les républicains n’a donc pas eu lieu, privant sans doute Donald Trump d’un tremplin dans sa volonté de reconquête de la Maison-Blanche.

Silencieux toute la matinée, l’ancien président s’est fendu d’un rare aveu, reconnaissant sur son réseau social Truth Social des résultats « quelque peu décevants ».

Nombre de ses lieutenants ont été battus. Et l’un de ses potentiels rivaux à l’investiture républicaine, le gouverneur de Floride Ron DeSantis, 44 ans, a volé la vedette en étant réélu de manière triomphale.

Le ténor républicain Kevin McCarthy, qui devrait en cas de victoire devenir le prochain président de la chambre basse, succédant à Nancy Pelosi, a lui assuré que son parti allait « reprendre la Chambre des représentants », dans la nuit de mardi à mercredi.

Si la victoire est confirmée, les républicains ont déjà annoncé la couleur : ils tenteront de mettre en pièces le programme de Joe Biden et ont promis d’ouvrir des enquêtes sur sa gestion du pouvoir.

Le Sénat joue les prolongations

Au Sénat, où les démocrates détenaient une très mince majorité avant l’élection, il faudra sûrement plusieurs jours, voire des semaines, avant qu’une majorité ne se dégage.

L’Arizona et le Nevada n’étaient pas encore décidés à 22 h GMT.

Et en Géorgie, comme en 2020, les électeurs joueront les prolongations. Aucun des candidats, le pasteur Raphael Warnock, sénateur sortant, et l’ancienne vedette du football américain Herschel Walker, n’ayant franchi la barre des 50 % des voix.

Un nouveau scrutin est d’ores et déjà prévu le 6 décembre.

Les démocrates ont arraché aux républicains l’un des sièges les plus disputés de ce scrutin, en Pennsylvanie, remporté par John Fetterman.

Pas truquées

Du côté des gouverneurs, après avoir pris deux postes aux républicains (dans le Maryland et le Massachusetts), le camp démocrate n’avait pas non plus dit son dernier mot dans l’Arizona, où le dénouement de la course entre la trumpiste Kari Lake, donnée favorite, et la démocrate Katie Hobbs, restait inconnu.

Dans cet État, des problèmes techniques ont été rencontrés, mais les élections n’ont pas été truquées, ont insisté mercredi les autorités locales.

Par ailleurs, les défenseurs du droit à l’avortement se réjouissaient d’avoir enregistré des victoires « historiques », y compris dans le très conservateur Kentucky, lors de référendums organisés dans le sillage de l’arrêt de la Cour suprême en juin.

Les Américains ont « envoyé un message clair et sans ambiguïté sur le fait qu’ils veulent préserver notre démocratie et protéger le droit de choisir dans ce pays », a souligné le président Biden.

Biden souhaite discuter avec Pékin de « lignes rouges »

Par ailleurs, Joe Biden a exprimé son souhait de discuter avec son homologue chinois Xi Jinping de « lignes rouges » mutuelles à ne pas franchir, lors du sommet des chefs d’État du G20 prévu mi-novembre.

« Ce que je veux faire avec lui, lorsque nous nous parlerons, c’est déterminer le type de lignes rouges » que nous devons respecter, a déclaré le dirigeant démocrate lors d’une conférence de presse à Washington.

M. Biden a précisé vouloir étudier l’existence d’un éventuel conflit entre « ce qu’il (Xi Jinping) estime relever des intérêts nationaux critiques de la Chine (et) ce que je sais être les intérêts nationaux critiques des États-Unis ».

Le président américain s’est dit prêt à œuvrer à la résolution d’un tel conflit, alors que les relations entre Pékin et Washington se sont récemment tendues et dégradées.

Le locataire de la Maison-Blanche se rend en fin de semaine en Asie, d’abord à un sommet de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean) à Phnom Penh, puis à une réunion du G20 à Bali et enfin au Forum de coopération Asie-Pacifique (Apec) à Bangkok.

Il s’agira de rendez-vous stratégiques pour les États-Unis, qui ont identifié la Chine comme leur « seul rival » à long terme et tentent de rallier à leur cause des pays, notamment en Asie du Sud-Est, qui sont réticents à s’opposer à Pékin.

Le président américain a confirmé mercredi qu’il aborderait la question très sensible de Taïwan avec Xi Jinping.

« La doctrine sur Taïwan n’a pas du tout changé », a encore répété M. Biden, en évitant de reformuler des précédents propos qui avaient irrité Pékin, selon lesquels l’armée américaine défendrait Taïwan si l’île était attaquée.

Xi Jinping a le mois dernier obtenu un troisième mandat à l’occasion du Congrès du Parti communiste chinois (PCC), renforçant son statut de dirigeant chinois le plus puissant depuis Mao Tsé-toung. Cela suscite la crainte à Taïwan, mais aussi à Washington, que la Chine ne redouble d’efforts pour obtenir sa réunification avec l’île.

Washington maintient historiquement une politique d’« ambiguïté stratégique » à propos d’une éventuelle intervention militaire américaine si Taïwan était attaqué par la Chine.

La Chine populaire estime que Taïwan est l’une de ses provinces, qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949.

Les liens d’Elon Musk à examiner

Les liens d’Elon Musk avec des pays étrangers « méritent d’être examinés », a ajouté Joe Biden, en réponse à une question sur la possibilité que le rachat de Twitter par le milliardaire représente une menace pour la sécurité nationale américaine.

« Je pense que la coopération d’Elon Musk, et/ou les relations techniques avec d’autres pays méritent d’être examinées », a-t-il dit, en réfléchissant visiblement avec soin aux mots employés pour sa réponse.

Le dirigeant démocrate répondait à une question concernant l’implication du prince saoudien Al-Walid bin Talal dans le rachat de Twitter par le patron du constructeur automobile Tesla.

Le prince al-Walid a en effet apporté à Elon Musk les presque 35 millions d’actions qu’il détenait déjà dans le réseau social, directement et via ses avoirs dans KHC, ce qui en fait le deuxième actionnaire du groupe.

Peu de temps après le rachat de Twitter, fin octobre, le sénateur démocrate Chris Murphy avait estimé dans un tweet que « nous devrions nous inquiéter du fait que les Saoudiens, qui ont clairement intérêt à réprimer l’expression politique et peser sur la politique américaine, sont désormais le deuxième propriétaire d’une grande plateforme de réseaux sociaux ».

Le sénateur annonçait par ailleurs demander au comité sur les investissements étrangers du Sénat d’ouvrir une enquête sur « les implications en matière de sécurité nationale du rachat de Twitter par l’Arabie saoudite ».

Pour Joe Biden, que M. Musk « fasse ou non quelque chose d’inapproprié, et je ne sous-entends pas que c’est le cas, cela mérite d’être examiné, c’est la seule chose que je peux en dire ».

Jusqu’ici peu préoccupé des questions politiques et géopolitiques, Elon Musk a donné son avis sur plusieurs sujets importants, notamment la guerre en Ukraine et les tensions entre la Chine et Taïwan.

Dans un premier cas, le milliardaire a proposé une solution impliquant la cession définitive de la Crimée à la Russie, « afin de réparer l’erreur historique de (Nikita) Khrouchtchev » ainsi qu’un véritable référendum dans les régions majoritairement russophones du pays afin de décider de l’avenir de ces parties du territoire ukrainien.

Concernant Taïwan, Elon Musk s’est prononcé en faveur d’une réunification des deux Chine à l’issue de négociations entre les deux côtés du détroit.

La Chine est le premier marché de Tesla où le groupe dispose d’une usine à Shanghai.

Dans les deux cas, les commentaires de l’homme d’affaires avaient suscité des réactions positives tant de la part de Moscou que du côté de Pékin.