(Charleston) Joe Biden a tenté lundi à Charleston, en Caroline du Sud, sur le site de l’un des pires massacres racistes de l’histoire américaine récente, de remobiliser l’électorat afro-américain, mais le président a aussi été rattrapé par le conflit entre Israël et le Hamas.

Le déplacement avait des allures de pèlerinage politique pour le démocrate de 81 ans, dont la campagne peine à trouver son rythme : il y a quatre ans, sa large victoire à la primaire démocrate de Caroline du Sud, ancien État esclavagiste, lui avait donné un élan décisif vers la Maison-Blanche.

Interrompu pendant son discours à la Mother Emanuel Church par des manifestants réclamant un cessez-le-feu à Gaza, le président américain a assuré qu’il « comprenait » leur émotion.

Le démocrate, dont la politique de très ferme soutien à Israël ne fait pas l’unanimité dans son propre camp politique, a dit qu’il « travaillait discrètement » afin qu’Israël « réduise nettement » sa présence dans le territoire.

Les manifestants ont été escortés à l’extérieur pendant que le reste de l’assistance entonnait « Quatre ans de plus ! Quatre ans de plus ! »

« Le suprémacisme blanc est un poison »

En 2015, un suprémaciste blanc avait abattu le pasteur et huit fidèles noirs de la Mother Emanuel Church de Charleston, un lieu intimement lié aux luttes des Afro-Américains à travers l’histoire, et qui avait accueilli, entre autres, Martin Luther King.

« Le suprémacisme blanc est un poison », a dit Joe Biden lundi, avant d’attaquer, comme il l’avait déjà fait vendredi, son grand rival Donald Trump, présenté comme un danger pour la démocratie.

Le président américain a aussi dénoncé le « mensonge » qui consiste à présenter la guerre de Sécession comme un conflit portant sur le droit des États américains, et non sur l’esclavage.

« L’esclavage a causé la guerre de Sécession », a-t-il martelé à Charleston, qui était l’un des principaux points d’entrée des bateaux transportant les esclaves.

Le démocrate faisait référence à une candidate à la primaire républicaine, Nikki Haley, très critiquée parce qu’elle n’a pas mentionné ce fait lors d’un échange récent avec des électeurs.

Esclavage

Pendant la guerre de Sécession (1861-1865), le Sud confédéré avait déclaré son indépendance des États-Unis et se battait pour conserver l’esclavage, aboli dans le reste du pays.

« Je suis ici pour dire une autre vérité, qui est que c’est grâce à cette assemblée, à la communauté noire de Caroline du Sud […] que je suis aujourd’hui président. J’ai fait de mon mieux pour honorer votre confiance », a encore dit Joe Biden, en rendant hommage à Jim Clyburn, élu de Caroline du Sud qui avait joué un rôle décisif dans sa victoire en 2020.

PHOTO KEVIN LAMARQUE, REUTERS

Jim Clyburn et Joe Biden

« Il nous faut choisir. Choisissons la vérité », a exhorté ce fervent catholique, avant de conclure ainsi : « Je ne crois pas que le bon Dieu nous a menés si loin pour nous laisser tomber. »

Donald Trump, qui caracole en tête des intentions de vote pour la primaire du Parti républicain, semble grignoter du terrain auprès de l’électorat afro-américain.

Cet électorat avait joué un rôle déterminant dans la victoire de Joe Biden il y a quatre ans, en votant à 92 % pour lui.

Abstention

Cette fois, à en croire de récents sondages, Donald Trump pourrait espérer jusqu’à 20 % des voix des électeurs et électrices noirs, voire plus.

Le danger, pour Joe Biden, n’est toutefois pas tant la perte de voix au profit de son rival républicain qu’une forte abstention de cet électorat.

« Nous n’avons pas été capables de briser le mur monté par les partisans de Trump pour dire aux gens ce que le président a fait pour eux » en matière de relance économique et de prestations sociales, a déploré Jim Clyburn, dimanche, sur CNN.

Il ne fait guère de doute que Joe Biden, sauf en cas de grave problème de santé ou d’une autre surprise, sera le candidat de son parti en novembre.

La primaire démocrate du 3 février en Caroline du Sud n’en sera pas moins un premier test important pour le président, handicapé par son âge et plombé par un mécontentement persistant des Américains concernant leur pouvoir d’achat.