(Vinton) Dans son exploitation enneigée de l’Iowa, Lance Lillibridge porte à bout de bras un veau, né il y a dix jours à peine. Son nom ? « DeSantis », un clin d’œil au candidat qu’il choisira lundi face au favori Donald Trump lors du coup d’envoi des primaires républicaines.

Cet agriculteur de 53 ans, installé près du village de Vinton, a soutenu l’ancien président Trump lors des deux dernières élections américaines. Il refuse de voter une troisième fois pour le milliardaire de 77 ans, qui écrase pourtant tout dans les sondages.

« On a un peu l’impression qu’il nous a laissé tomber », regrette l’homme au blouson marron, face à ses imposants silos de maïs, tous recouverts de neige.

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Lance Lillibridge et son veau « DeSantis »

L’exploitant garde en travers de la gorge des arbitrages de Donald Trump sur le bioéthanol, un carburant à base de maïs dont son État du Midwest est le principal producteur.

Lundi, quand l’Iowa lancera le grand bal des primaires républicaines, qui doivent désigner le rival du président démocrate Joe Biden, son choix se portera plutôt sur le gouverneur de Floride, Ron DeSantis.

« L’homme de la situation »

« Il est très compétent en ce qui concerne l’agriculture », juge le fermier, entouré de ses vaches, regroupées sur un tapis de paille pour se tenir chaud.

« Quand il a appris que j’avais eu un accident de moto » à l’été, « il m’a appelé pour savoir comment j’allais », souligne Lance Lillibridge, balayant les critiques récurrentes sur un supposé manque de charisme du candidat républicain.

Convaincu que ce candidat est « l’homme de la situation », il a pris la tête du groupe de soutien « les agriculteurs pour DeSantis » et s’attelle à appeler les 2000 fermiers qu’il connaît pour prêcher la bonne parole.

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Une photo de Ron DeSantis est accroché au mur chez Lance Lillibridge.

Un argument récurrent : la guerre commerciale tous azimuts engagée par Donald Trump durant son mandat, qui a pesé sur les exportations de ces fermiers du Midwest.

« On a perdu beaucoup d’argent »

2017, 2018 et 2019 — quand les États-Unis et la Chine se sont affrontés à coup de tarifs douaniers — ont été les « pires années pour être agriculteur », abonde Robb Ewoldt, un exploitant de Davenport, à 180 kilomètres de là.  

« On a perdu beaucoup d’argent », dénonce l’homme qui avait lui aussi soutenu Donald Trump lors des deux précédents scrutins.  

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Robb Ewoldt

Après avoir voyagé le long du fleuve Mississippi, la majorité des récoltes du quinquagénaire, du maïs et du soya partent vers l’Asie ou l’Europe.

Si l’agriculteur affable n’a rebaptisé aucun de ses 4000 porcs du nom de Ron DeSantis, il apprécie tout autant « les valeurs » du gouverneur de Floride.

« J’aime la façon dont il a géré la pandémie dans son État, il a gardé les commerces et les écoles ouvertes », souligne-t-il.

Depuis son hangar, le cultivateur confie d’ailleurs douter fortement de l’avance vertigineuse dont Donald Trump est crédité en Iowa — plus de 53 % selon les sondages. Son poulain Ron DeSantis stagne lui plutôt autour de 15 %.

« Je connais beaucoup de conservateurs, et je n’imagine pas comment la moitié va voter pour Donald Trump », tranche Robb Ewoldt.

Le verdict tombera à partir de 19 h lundi, lorsque les électeurs de l’Iowa se réuniront dans les écoles, bibliothèques et casernes de pompiers de l’État pour désigner, à bulletin secret, leur candidat.

Soutiendra-t-il la candidature de Donald Trump à la présidentielle, si l’ex-dirigeant arrive en tête des primaires ?

L’agriculteur souffle.

« On ira quand même voter », affirme-t-il. « Mais en se pinçant le nez. »