(Nashua, New Hampshire) En entrant dans l’hôtel de Nashua où Donald Trump devait faire la fête avec ses partisans mardi soir – mais où il s’est plutôt emporté contre sa rivale –, Carlos Pieis avait un message clair pour Nikki Haley, que l’ancien président n’a pas voulu lui-même formuler.

« Elle devrait se retirer demain », a dit l’homme d’affaires de Hanover sans même attendre les résultats de la primaire républicaine du Granite State. « Il n’y a aucune voie qui puisse la mener à la victoire. »

Les résultats du scrutin ont renforcé son point de vue. Donald Trump a complété au New Hampshire un doublé qui devrait lui assurer l’investiture républicaine pour l’élection présidentielle de 2024, si l’on se fie à l’histoire et aux sondages récents.

Après avoir remporté une victoire convaincante lors des caucus de l’Iowa la semaine dernière, l’ancien président a défait sa dernière rivale lors de la première primaire de la saison électorale, récoltant 54,9 % des voix contre 43,5 % pour l’ancienne gouverneure de la Caroline du Sud.

Aucun candidat républicain n’a échoué à obtenir l’investiture présidentielle de son parti après avoir gagné les deux premiers scrutins de la course, ceux de l’Iowa et du New Hampshire.

Donald Trump, qui doit répondre à 91 chefs d’accusation dans quatre affaires criminelles, devance par ailleurs Nikki Haley de plus de 30 points de pourcentage dans les sondages réalisés en Caroline du Sud, l’État qui tiendra la prochaine primaire républicaine, le 24 février.

Victorieux, mais furieux

Mais il n’avait pas le cœur à la fête lorsqu’il s’est adressé à ses partisans. Avouant d’emblée sa colère, il a prononcé un discours inédit dans les circonstances, fulminant contre Nikki Haley qui venait de se moquer de lui lors d’un discours au cours duquel elle avait également promis de poursuivre sa campagne au lieu de jeter l’éponge.

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Donald Trump, lors de son discours de victoire, à Nashua

« Je pourrais me présenter [sur cette tribune] et dire : “Merci pour la victoire”, ou je pourrais dire : “Qui est l’imposteur qui est monté sur la scène avant moi et a revendiqué une victoire ?” », a-t-il dit sur un ton rageur en parlant de Nikki Haley.

Elle a obtenu un très mauvais résultat, en fait. Elle devait gagner.

Donald Trump, candidat à l’investiture républicaine

Après avoir laissé éclater ainsi sa colère, Donald Trump a cédé la parole pour un peu plus d’une minute à Vivek Ramaswamy, un de ses anciens rivaux, qui a reproché à Nikki Haley de ne pas avoir annoncé son retrait de la course.

Ayant repris la parole, Donald Trump a menacé Nikki Haley en lançant des insinuations à son sujet.

« Juste un petit mot sur Nikki. Elle ne va pas gagner. Mais si elle gagnait, elle ferait l’objet d’une enquête de la part de ces gens-là après 15 minutes », a-t-il dit en parlant des démocrates. « Et je pourrais déjà vous donner cinq raisons pour cela. Pas de grandes raisons, mais des choses dont elle ne veut pas parler. »

Plus tôt dans la soirée, lors d’un discours à Concord, Nikki Haley avait notamment soulevé la question de la santé cognitive de Donald Trump, revenant sur le discours récent où l’ancien président l’a confondue avec Nancy Pelosi.

« Je réclame depuis longtemps des tests de compétence mentale pour les hommes politiques âgés de plus de 75 ans », a-t-elle enchaîné. « Trump prétend qu’il ferait mieux que moi à l’un de ces tests. Peut-être que oui, peut-être que non. Mais s’il pense cela, il ne devrait avoir aucun problème à se tenir sur la scène d’un débat avec moi. »

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Nikki Haley, lors de son discours, à Concord

Nikki Haley a également rappelé les défaites électorales attribuées ou infligées à Donald Trump depuis 2018.

Avec Trump, les républicains ont perdu presque toutes les élections. « Nous avons perdu le Sénat, nous avons perdu la Chambre, nous avons perdu la Maison-Blanche, nous avons perdu en 2018. Nous avons perdu en 2020, et nous avons perdu en 2022.

Nikki Haley, candidate à l’investiture républicaine

Un de ses partisans l’a interrompue en criant : « Trump est un perdant ! »

Mais il a bel et bien remporté une primaire dans un État taillé sur mesure pour Nikki Haley. Selon les sondages réalisés à la sortie des urnes pour NBC, l’électorat de la primaire républicaine du New Hampshire était composé de 47 % de républicains, 45 % d’indépendants et 8 % de démocrates. Ces démocrates avaient changé leur affiliation il y a plusieurs mois.

Qui plus est, 64 % des électeurs ont dit ne pas s’identifier au mouvement Make America Great Again.

Et pourtant, Donald Trump a gagné par une marge de 10 points de pourcentage.

La suite du marathon

La gouverneure de Caroline du Sud pense-t-elle avoir plus de succès ailleurs ? En matinée mardi, sa directrice de campagne, Betsy Ankney, a envoyé aux journalistes une note détaillant les raisons pour lesquelles la candidate de 52 ans n’avait pas l’intention de se retirer de la course après le New Hampshire.

Elle a d’abord contesté l’idée selon laquelle le New Hampshire était le dernier État dont l’électorat pouvait aider la cause de Nikki Haley. Elle a rappelé que les indépendants pourraient également participer aux primaires de la Caroline du Sud et du Michigan, prévues les 24 et 27 février.

Viendra ensuite le 5 mars, date du Super Tuesday, où 11 des 16 États qui mettront en jeu un total de 874 délégués ont des primaires ouvertes ou semi-ouvertes. Il s’agit notamment de la Virginie, du Texas, du Maine, du Massachusetts, du Minnesota, de la Caroline du Nord et du Vermont, qui présentent une démographie favorable à Nikki Haley, selon sa directrice de campagne.

D’ici là, tout le monde devrait respirer profondément, La campagne n’est encore commencée dans aucun de ces États.

Betsy Ankney, directrice de campagne de Nikki Haley

Mais il n’est pas certain que Nikki Haley puisse se permettre d’étirer la course encore longtemps sans se mettre davantage à dos les partisans de Donald Trump.

« J’ai l’impression que c’est une perte de temps et de ressources », a dit Dylan Quattrucci, un jeune républicain de 26 ans, en célébrant la victoire de Donald Trump dans l’hôtel de Nashua. « Chaque dollar que Nikki Haley investit dans sa campagne pourrait aller au président Trump pour qu’il s’oppose à Joe Biden. Je pense que c’est là-dessus qu’il faut se concentrer en ce moment, parce que l’Amérique s’effondre sous la direction de Joe Biden. »

C.S. Clark, une autrice de Manchester, s’est néanmoins réjouie du message qu’envoie la victoire de Donald Trump au New Hampshire.

« Le message est que l’Amérique est de retour, a-t-elle dit. Nos frontières seront plus sûres et notre économie plus forte. Les choses vont redevenir ce qu’elles étaient. »

La Maison-Blanche a également laissé entendre que cette victoire réjouissait Joe Biden. Ce dernier croit que ses chances d’être réélu augmenteront lorsque les électeurs réaliseront que Donald Trump sera le candidat du Parti républicain.

« Il est désormais clair que Donald Trump sera le candidat républicain. Et mon message au pays est que les enjeux ne pourraient pas être plus élevés », a-t-il déclaré dans un communiqué après avoir remporté la primaire symbolique du Parti démocrate au New Hampshire.