(Des Moines, Iowa) Les électeurs républicains de l’Iowa lanceront lundi la saison des caucus et des primaires qui doit mener à la sélection du candidat présidentiel de leur parti. Chaque État mettra en jeu un nombre déterminé de délégués, qui seront désignés sur une base proportionnelle ou selon le système du gagnant qui rafle tout. La nomination ira au candidat qui revendiquera au moins 1216 délégués sur 2430. Mais avant d’en arriver là, La Presse s’est adressée à Barbara Trish, politologue au Grinnell College, en Iowa, pour démystifier le scrutin de cet État rural du Midwest.

Caucus et primaires : quelle est la différence ?

Il s’agit dans les deux cas d’évènements au cours desquels les électeurs sont invités à se prononcer sur la nomination du candidat présidentiel de leur parti. La véritable différence réside dans le fait qu’une primaire est une élection organisée par l’État, alors qu’un caucus est une réunion organisée par un parti. Lors d’un caucus, comme celui que les républicains tiendront lundi soir, les participants se rencontrent dans un lieu communautaire afin de voter pour le candidat qu’ils préfèrent. Il leur suffit d’écrire le nom du candidat sur un bout de papier plutôt que d’inscrire leur choix sur un bulletin de vote traditionnel, comme c’est le cas à l’occasion d’une primaire. Autre différence : alors que les primaires se déroulent sur une journée entière, le caucus a lieu à une heure précise, en l’occurrence 19 h en Iowa. Il n’est pas possible de participer à un caucus si l’on n’est pas présent en personne à l’heure prévue.

D’un point de vue historique, quel rôle les caucus de l’Iowa ont-ils joué dans la sélection des candidats présidentiels ?

Historiquement, et c’est vrai pour les deux partis, le rôle des caucus a vraiment été de trier les candidats. Il s’agit un peu plus de cela que de choisir la personne qui sera le candidat à la fin. Ainsi, avant le caucus et immédiatement après, on constate souvent que des candidats se retirent. Dans certains cas, il s’agit d’un moyen d’établir la crédibilité d’un candidat. Le meilleur exemple est probablement celui de Barack Obama, qui a bénéficié d’un véritable coup de pouce après sa victoire dans l’Iowa en 2008.

Donald Trump a été défait de justesse par Ted Cruz en 2016 lors des caucus de l’Iowa. Les sondages lui donnent aujourd’hui une avance considérable sur ses rivaux. Son approche a-t-elle changé ?

En 2016, pour autant que nous puissions en juger, Donald Trump s’est contenté de miser sur son propre charisme. Il a tenu de grands rassemblements, mais en nombre limité. Il n’avait pas vraiment d’organisation dans l’État, c’est-à-dire de personnel expérimenté sur le terrain, ou de structure bénévole, ce qui est la norme pour une course à l’investiture aux États-Unis. En revanche, en 2024, sa campagne a mis en place une organisation de bénévoles et semble accorder plus d’attention au fait de s’assurer que partisans ou partisans potentiels soient bien informés de la mécanique des caucus. Elle ne sera pas prise de court comme en 2016.

Ron DeSantis jouit de soutiens importants en Iowa, y compris la populaire gouverneure de l’État, Kim Reynolds. Il a aussi reçu l’appui de Bob Vander Plaats, l’une des figures les plus importantes de la droite chrétienne dans cet État, où l’électorat évangélique est crucial. Or, les chrétiens évangéliques demeurent fidèles à Trump, selon les sondages. Comment expliquer ce phénomène ?

Je pense que les succès de Trump auprès des chrétiens évangéliques tiennent en bonne partie au fait que les personnes qu’il a placées à la Cour suprême ont rendu des décisions favorables à la droite religieuse.

Qu’est-ce qui pourrait être considéré comme un succès en Iowa pour Nikki Haley ou DeSantis, qui luttent en fait pour la deuxième place à l’occasion des caucus ?

En politique, que ce soit lors des caucus de l’Iowa ou de tout autre scrutin, la notion traditionnelle du succès, c’est de faire mieux que ce que l’on attend de vous. Il est concevable que Haley ou DeSantis, qui tournent tous deux autour de 17 % dans les récents sondages, obtiennent 25 % des voix, ce qui pourrait être considéré comme un grand succès et leur donner un élan pour la primaire républicaine du New Hampshire.

On annonce un froid sibérien le soir des caucus. DeSantis prétend que la météo jouera en sa faveur. A-t-il raison ?

On ne sait pas du tout quel sera l’impact de la météo sur les caucus. Logiquement, si vous avez des républicains moins engagés et moins expérimentés dans votre camp, ils pourraient rester à la maison. À 18 h, un soir d’hiver, il y a beaucoup de raisons de rester chez soi. Le froid intense en est une. Je pense que cela va faire baisser le taux de participation. Il se peut que Donald Trump, qui se targue d’attirer de nouveaux électeurs, soit celui qui écope le plus. Mais je pense qu’il est vraiment difficile de prédire quoi que ce soit sur ce plan.