En l'an 2000, l'entreprise British Petroleum a changé son nom pour devenir « BP «, et a lancé son nouveau slogan : « Beyond Petroleum « (Au-delà du pétrole). Dix ans plus tard, BP doit gérer une catastrophe environnementale majeure dans le golfe du Mexique, dans laquelle 11 de ses employés ont perdu la vie. Plusieurs controverses entourent les actions de la multinationale la plus grande entreprise du Royaume-Uni. En voici un aperçu

Estimations erronées

Depuis un mois, les données que BP fournit diminuent l'ampleur de la marée noire. L'entreprise a initialement affirmé que l'équivalent de 1000 barils de pétrole étaient propulsés chaque jour dans le Golfe. Cette estimation a grimpé à 5000 barils, après que des groupes indépendants eurent soulevé des critiques.

 

Hier, Doug Suttles, directeur de BP, a admis que le volume du déversement était «sans doute plus élevé».

Curtis Deutsch, océanographe rattaché au département des sciences océaniques de UCLA, suit ces développements avec intérêt. «De l'extérieur, BP semble davantage préoccupé par l'aspect légal du déversement, plutôt que par l'aspect environnemental, explique-t-il en entrevue. Donner des estimations basses a pour effet de réduire la pénalité à laquelle l'entreprise sera exposée en cour.»

En point de presse, jeudi, Ed Markey, responsable du comité sur l'Énergie et le Commerce chargé d'étudier la marée noire à la Chambre des représentants, a eu des mots extrêmement durs à l'endroit de l'entreprise.

«BP a perdu toute crédibilité. Maintenant, les décisions devront être prises par d'autres, car il est clair que l'entreprise a cherché à camoufler les véritables conséquences de ce déversement», a lancé le démocrate du Massachusetts.

BP a signalé cette semaine que le calcul du volume du pétrole échappé «n'était pas une priorité». Pourtant, son propre guide de conduite en cas de déversement stipule : « Avoir une estimation précise du volume du déversement est essentiel pour planifier et mettre en place les efforts de nettoyage. «

Selon BP, au moins 26 millions de litres de pétrole se sont échappés depuis un mois. Les experts indépendants placent le déversement entre 260 millions et 495 millions de litres. En 1989, l'Exxon Valdez avait déversé 41 millions de litres de pétrole en Alaska.

Contrôle médiatique

BP et la Garde côtière américaine ont adopté une attitude agressive face à la présence de reporters non accrédités par BP sur les zones touchées par la marée noire.

Hier, Mac McClelland, journaliste au magazine Mother Jones, s'est fait interdire l'accès à une plage souillée de Grand Isle, au sud de la Louisiane. La veille, les autorités avaient fermé l'accès aux berges de l'île Elmer, également touchée par la marée noire.

La plage à laquelle elle voulait accéder, dit Mme McClelland, n'était pas fermée : des touristes s'y prélassaient et des enfants jouaient dans les vagues, près des dépôts de pétrole sur le sable.

« Les policiers étaient très agressifs, ils criaient contre moi, explique en entrevue Mme McClelland. Ils disaient que BP décidait des règles. C'est la première fois que je vois une telle chose. «

Mardi, des employés de BP et des membres de la Garde côtière (branche de l'armée américaine) ont expulsé une équipe de CBS qui prenait des images d'un marais contaminé, dans le comté de St. Bernard. Ils disaient agir «selon les directives de BP».

Manquements répétés à la sécurité

Les installations de BP aux États-Unis sont les moins sûres de l'industrie. C'est ce qu'a révélé une étude exhaustive menée ce mois-ci par le Center for Public Integrity, organisation établie à Washington. En étudiant les violations relevées par les inspecteurs fédéraux depuis trois ans, les auteurs ont réalisé que 97 % d'entres elles concernaient des infractions graves à deux raffineries de BP, situées au Texas et en Ohio.

Pour ces deux installations, BP a reçu 862 plaintes entre juin 2007 et février 2010. Le secrétariat américain du Travail a imposé une amende de 87,4 millions de dollars à BP, en 2009.