Après avoir connu une journée noire lundi, la plupart des grandes Bourses européennes ont rebondi modestement hier. Un répit qui pourrait être de courte durée au dire d'analystes inquiets de l'absence de cohésion des dirigeants du continent face à la crise financière.

Les ministres des Finances des pays membres de l'Union européenne (UE), réunis au Luxembourg, ont annoncé durant la journée qu'ils s'étaient entendus pour rehausser le niveau de garantie des dépôts bancaires jusqu'à 50 000 euros.

Certains États, comme la Grèce, l'Allemagne et l'Irlande, ont déjà annoncé leur volonté de couvrir la totalité des dépôts, créant une forte pression sur les pays voisins, qui craignent une fuite de capitaux.

Les participants au sommet de l'UE ont par ailleurs souligné, dans une déclaration commune, que «chacun d'entre eux prendra toutes les mesures nécessaires pour assurer la stabilité du système financier».

L'idée de créer un fonds de sauvetage européen reflétant le plan adopté aux États-Unis n'a pas été retenue.

«Je suis très pessimiste... S'il n'y a pas de volonté d'action concertée de la part des chefs d'État, il n'y a rien à faire», a commenté Karel Lannoo, économiste rattaché au Center for european policy studies (CEPS), groupe de recherche respecté de Bruxelles.

M. Lannoo estime que l'accalmie d'hier pourrait rapidement être oubliée si une initiative européenne n'est pas lancée pour recapitaliser les banques les plus importantes. Plusieurs établissements, dit-il, sont devenus trop grands pour qu'un seul pays puisse les sauver s'ils sont frappés de plein fouet.

«Les opérations de sauvetage non coordonnées, loin de rétablir la confiance, alimentent la peur des épargnants et des investisseurs et poussent l'Europe vers une crise bancaire de grande ampleur. Dans le processus, la probabilité d'un ralentissement économique majeur devient encore plus importante», souligne une analyse du CEPS publiée hier.

Signe du pessimisme ambiant, un groupe d'économistes respectés a publié au cours des derniers jours dans les grands quotidiens européens une lettre ouverte alarmiste dans laquelle ils pressent les élus d'agir de manière concertée.

«Sauver une seule banque à la fois ne fonctionne pas: une crise systémique requiert une solution systémique», soulignent les auteurs, en précisant que «les économies de centaines de millions d'Européens sont en jeu».

«Si les dirigeants européens ne s'unissent pas immédiatement pour résoudre cette crise avant qu'elle ne s'aggrave jusqu'à devenir incontrôlable, ils pourraient bien finir par se battre sur la meilleure façon de gérer les conséquences», préviennent-ils.

Même son de cloche du journal Les Échos, qui fustige l'action des élus européens. «Quand tout va bien, l'Europe peut se donner des allures d'union, avec hymne et drapeau. Mais quand tout va mal, on l'a vu, les emblèmes nationaux ressurgissent et l'Europe redevient ce qu'elle est vraiment: puissante en rêve, impuissant en réalité», souligne le journal économique en page éditoriale.

En dépit de la remontée des Bourses, plusieurs titres bancaires continuaient d'être malmenés hier par les investisseurs en raison de la crise. Notamment en Grande-Bretagne, où l'éventualité d'un plan de recapitalisation gouvernemental a alimenté les inquiétudes.

L'Islande, très touchée par la crise, a annoncé la nationalisation de la deuxième banque en importance du pays, Landsbanki. Une banque en ligne anglaise appartenant à l'établissement islandais, Icesave, qui compte 350 000 clients en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, a suspendu hier les dépôts et les retraits tandis que les autorités évoquaient les risques de faillite.

«Nous sommes désolés des inconvénients que cela peut vous causer. Et nous espérons pouvoir vous fournir plus d'information sous peu», indiquait l'entreprise sur son site web en fin d'après-midi.