Dans un climat explosif, la Grèce vivait mercredi une grève générale prévue de longue date qui a été émaillée de nouvelles violences, au cinquième jour des émeutes qui ont plongé le pays dans une profonde crise sociale et politique.

La crise déclenchée par la mort d'un adolescent de 15 ans, abattu samedi à Athènes par un policier, s'installait dans la durée, malgré les appels au calme du premier ministre Costas Caramanlis.

Mercredi, de nouveaux affrontements ont opposé manifestants et police à Athènes et Salonique, la deuxième ville du pays, les forces de l'ordre répondant par des jets de gaz lacrymogènes aux tirs de cocktails Molotov et projectiles divers.

Les syndicats grecs, dont la Confédération générale des travailleurs grecs (GSEE, 600 000 adhérents) et la Fédération des fonctionnaires (Adedy, 200 000 membres), avaient convoqué de longue date une grève générale de 24 heures pour dénoncer la politique d'austérité du gouvernement conservateur et appelé à un rassemblement «paisible» devant le Parlement grec, dans le centre d'Athènes.

Des échauffourées ont éclaté en marge de ce rassemblement qui a réuni plusieurs milliers de personnes, a rapporté un journaliste de l'AFP.

D'autres affrontements ont émaillé une manifestation à Salonique, dans le nord de la Grèce, à laquelle participaient environ 2000 personnes, dont de nombreux élèves et étudiants, a indiqué une source policière locale.

Le premier ministre avait souhaité mardi, dans un discours à la Nation, qu'il n'y ait pas de confusion entre les combats des travailleurs et la mort de l'adolescent.

Mais la crise a pris une tournure politique, notamment avec l'appel à la démission du gouvernement, déjà déstabilisé par une série de scandales et par les retombées de la crise économique internationale, lancé mardi par l'opposition socialiste.

Les transports terrestres, aériens et maritimes devaient être perturbés par la grève, qui affecte également le fonctionnement des banques, administrations et grandes entreprises du secteur public, comme l'Electricité de Grèce (DEI).

La colère des jeunes, signe selon des observateurs d'un profond malaise et d'une radicalisation de la jeunesse grecque minée par l'insécurité économique et le chômage, avait repris de plus belle mardi après les obsèques, dans une banlieue d'Athènes, du jeune Alexis Grigoropoulos.

Selon les premiers résultats de l'autopsie, l'adolescent a été tué par le ricochet d'une balle tirée par un policier, a-t-on appris mercredi de sources judiciaires.

Quarante et une personnes, 16 Grecs et 25 étrangers, ont été arrêtées dans la nuit lors d'escarmouches et de pillages aux abords de l'école polytechnique d'Athènes, occupée depuis dimanche par des étudiants.

Des heurts se sont poursuivis pendant la nuit entre les policiers et plus d'une centaine de jeunes qui sortaient périodiquement de cette école et de la faculté de droit.

Le maire de la capitale, Nikitas Kaklamanis, avait estimé mardi soir que plus de 360 magasins avaient été «partiellement ou totalement endommagés» depuis samedi.

A Salonique, une cinquantaine de jeunes retranchés dans la faculté de philosophie avaient affronté les forces de police pendant la nuit de mardi à mercredi. Plus de 80 magasins et 14 banques ont subi des dégâts tandis que huit personnes ont été arrêtées.

A Patras, dans l'ouest du Péloponnèse, il y a eu des échauffourées en début de soirée. Des escarmouches se sont par ailleurs produites à Larissa et à Volos (centre), à Kalamata (sud), à Ioannina (nord-ouest) et à Zante, sur l'île du même nom en mer ionienne, selon des sources policières. La situation était redevenue calme mercredi dans toutes ces villes.

Dans un souci de reprendre la main sur des événements qui lui ont largement échappé, M. Caramanlis a adressé mardi soir un nouveau message à la nation condamnant les fauteurs de trouble comme «des ennemis de la démocratie».

Il s'est engagé «à rétablir le sentiment de sécurité et la légalité», et lancé de nouveau un appel à l'unité nationale.

«Il faut condamner clairement les violences, les pillages, le vandalisme des éléments extrémistes (...) en ces heures on ne peut pas avoir de différences nationales», a souligné le premier ministre.

Il n'a pas répondu au chef de l'opposition socialiste Georges Papandréou qui avait demandé dans la journée un recours «au verdict populaire» pour résoudre la crise.