Les responsables politiques flamands en Belgique, premier ministre en tête, mettent depuis quelques semaines leurs revendications autonomistes en sourdine, du fait de la crise économique et alors que la Belgique se prépare bientôt à assumer la présidence de l'UE.

La métamorphose est particulièrement spectaculaire chez le chef du gouvernement Yves Leterme.

Ce chrétien-démocrate qui avait remporté les dernières élections législatives de juin 2007 sur un programme agressif promettant à la Flandre, la région néerlandophone du nord de la Belgique, d'obtenir plus de pouvoirs, se montre aujourd'hui conciliant.

«La Belgique est un pays qui a d'énormes atouts», vient de déclarer au journal francophone La Libre Belgique M. Leterme, revenu à la tête du gouvernement fédéral fin 2009 à la faveur de la nomination d'Herman Van Rompuy à la présidence du Conseil européen.

C'est pourtant lui qui, en 2006, affirmait que la Belgique «n'est pas une valeur en soi» et qu'il ne participerait pas à un gouvernement «s'il n'y a pas de nouveaux transferts de compétences vers les régions».

Trois ans plus tard, le premier ministre, qui a échoué en 2007 et 2008 à concrétiser cette réforme, prône un «véritable fédéralisme de coopération» entre les trois régions belges: la Flandre, la Wallonie et Bruxelles.

«C'est un plus de travailler ensemble», souligne M. Leterme, dont la maladresse et des propos jugés offensants par les francophones avaient contribué à radicaliser les tensions lors de son premier passage à la tête du gouvernement. Et à mettre le royaume au bord de l'éclatement.

Yves Leterme, comme l'ensemble de la classe politique flamande, continue à appeler de ses voeux une «évolution des institutions».

«Mais le fait que ces évolutions n'aient pas lieu pour l'instant ne doit pas être un alibi pour ne pas travailler» à renforcer l'économie nationale, dit-il aujourd'hui.

«Cette évolution du CD&V (le parti d'Yves Leterme et première formation politique de Belgique) était déjà sensible sous l'ère Van Rompuy», souligne le politologue flamand Dave Sinardet.

«Outre la détérioration de la situation économique, le contexte politique a changé et ne se prête plus à une grande réforme», a expliqué à l'AFP le chercheur de l'université d'Anvers.

C'est que le 1er juillet, la Belgique prendra pour six mois la présidence tournante de l'Union européenne. «Durant cette période, on voudra éviter toute instabilité ou crise interne, d'autant que l'image de la Belgique a été écornée ces dernières années», prédit Dave Sinardet.

Et dès la fin de la présidence de l'UE, le pays entrera dans la campagne pour les législatives de mai 2011, période peu favorable aux compromis.

Même Bart De Wever, le bouillant président du parti indépendantiste flamand NVA, reconnaît à présent qu'il n'y aura pas de nouveaux transferts de pouvoirs vers la Flandre avant les élections.

«Espérons que les électeurs flamands donneront en 2011 un nouveau signal en faveur d'une telle réforme», a déclaré lundi le patron de la NVA.

Si les partis flamands ont remisé, au moins temporairement, leurs revendications autonomistes les plus dures, tout n'est pas réglé.

L'ancien premier ministre Jean-Luc Dehaene a été chargé par le roi de négocier en coulisses, d'ici Pâques, un accord sur l'épineuse question de l'arrondissement électoral bilingue de Bruxelles-Hal-Vilvorde, sur laquelle Flamands et francophones se déchirent depuis plus de 30 ans.

Toutefois, les signaux les plus récents sur ce dossier montrent une volonté de rapprochement des deux grandes communautés.