À l'appel des syndicats, des centaines de milliers de travailleurs des secteurs public et privé ont manifesté dans les grandes villes françaises hier dans l'espoir de convaincre le gouvernement d'en faire plus pour l'emploi et le pouvoir d'achat. Celui-ci a répondu en abandonnant le projet controversé de taxe carbone, mais en réaffirmant sa volonté de réformer les caisses de retraite.

Deux jours après que la droite eut encaissé une sévère défaite aux élections régionales, plus de 150 manifestations étaient prévues en France hier.

 

Les dirigeants syndicaux, qui appelaient de leurs voeux un «troisième tour social», espèrent convaincre le gouvernement de prendre des mesures contre le chômage, en forte hausse. Ils s'inquiètent aussi de sa volonté de réformer les régimes de retraite, sérieusement sous-financés.

Le président de la Confédération française démocratique du travail (CFDT), François Chérèque, prévient que le climat social est «explosif» avec la multiplication des plans sociaux et la montée de la «souffrance au travail».

Le secrétaire général de la Confédération générale du travail (CGT), Bernard Thibault, note que les mesures prises par le gouvernement pour contrer la crise économique ont permis de «conforter les profits des entreprises» sans favoriser véritablement la reprise.

On persiste pendant ce temps «à supprimer massivement des postes indispensables à des missions utiles comme la santé, l'éducation, la recherche», dénonce l'organisation, en référence à la politique d'attrition suivie par l'État.

Perte d'acquis

Annie Bonnet, qui travaille comme infirmière depuis plus de 30 ans, affirme que le gouvernement ne cesse de faire des coupes dans ses dépenses sans égard à leur incidence sur les services à la population.

La femme de 55 ans, croisée à la manifestation qui partait hier de la place de la République, à Paris, s'inquiète de la révision projetée du régime de retraite. «On voit de plus en plus nos acquis s'envoler», souligne la dame, qui ne croit pas à l'urgence budgétaire qu'invoquent les élus. «Le manque d'argent, ça a toujours été leur dire, qu'il y ait crise ou pas», souligne-t-elle.

Bernard Perrin, employé dans une entreprise qui fabrique des fours de sidérurgie, est venu manifester «pour l'avenir».

«Ça va mal pour l'emploi. Les entreprises délocalisent de plus en plus les emplois, en particulier en Chine et en Inde», souligne-t-il.

De multiples manifestants s'étaient dotés d'affiches dénonçant la détérioration de leurs conditions de travail. Certains portaient des figurines de carton représentant les employés de France Télécom qui se sont suicidés.

Annie Bonnet pense que les syndicats ne devraient pas hésiter à se radicaliser si la manifestation ne donne pas les fruits escomptés. «Les actions que nous menons sont très pacifiques. C'est un peu bon enfant», lance-t-elle avant de se fondre dans la foule.