Un Turc qui avait obtenu la nationalité suisse par mariage alors qu'il entretenait parallèlement une relation maritale dans son pays d'origine va devoir rendre son passeport, a décidé la justice suisse.

Pour les juges du Tribunal administratif fédéral, l'homme était un «bigame de facto» et n'est resté marié en Suisse que pour assurer sa naturalisation.

L'homme avait fait appel d'une décision de l'Office fédéral des migrations (ODM) qui avait décidé en 2008 de lui retirer son passeport rouge à croix blanche, obtenu en 2003 grâce à son mariage avec une citoyenne suisse.

«En réalité, le requérant vivait une vie de bigame, ce qui n'est pas autorisé en Suisse», ont relevé les juges du Tribunal administratif fédéral dans un arrêt en allemand du 11 mai rendu public mardi.

L'homme, qui a été marié durant 26 ans avec une Suisse dont il a eu une fille, menait une double vie. Il se rendait quatre fois par an en Turquie où il avait une autre compagne, une compatriote avec laquelle il a eu deux enfants.

Son épouse suisse, dont il a entre-temps divorcé pour se marier en 2009 avec sa compagne turque, n'avait d'abord rien su de cette union parallèle avant de s'y résigner dans l'intérêt de sa fille, avait-elle expliqué.

Ce qui a emporté la décision des juges c'est que le couple a en réalité décidé d'attendre pour divorcer que l'homme obtienne définitivement la nationalité suisse, ce qui nécessitait de rester marié durant cinq ans après sa naturalisation en 2003.

«Dans les faits, on peut considérer qu'il n'y avait pas de relation» de couple entre l'homme et son épouse suisse, selon l'arrêt du Tribunal administratif fédéral.

Selon l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, l'homme a voulu quitter dès 1996 son épouse suisse, plus âgée que lui d'une vingtaine d'années, et était alors retourné en Turquie. Cependant le mari et la femme ont décidé qu'ils ne se sépareraient que lorsque l'homme aurait obtenu la nationalité helvétique.

Étant donné que les autorités suisses peuvent retirer sa nationalité à un conjoint étranger naturalisé par mariage si le couple divorce dans les cinq ans qui suivent l'octroi de la nationalité, le couple a attendu jusqu'en 2008 pour entamer la procédure de divorce.

Pendant ce temps, l'homme se rendait fréquemment en Turquie auprès de sa deuxième femme avec qui il a eu un 3e enfant en 2004, l'année suivant sa naturalisation en Suisse. Les juges relèvent par ailleurs que l'homme pouvait apporter une aide financière à sa famille en Turquie et aller la voir souvent parce qu'il ne travaillait pas en Suisse mais y percevait des allocations pour handicapé.