La question de la place des femmes dans le clergé menace de faire éclater l'Église d'Angleterre. Les anglicans entrouvrent pour la première fois la porte aux femmes évêques, mettant à mal la paix fragile entre les factions libérale et conservatrice.

Le camp libéral de l'Église d'Angleterre a remporté une bataille importante, lundi dernier: la communion a fait un pas décisif vers la consécration de femmes évêques. Elles pourraient porter la mitre dès 2014.

Après des débats longs et houleux, 370 des 480 prélats de l'Église ont adopté un texte de loi en ce sens. Il sera étudié par les 43 diocèses anglais d'ici la prochaine assemblée. La minorité traditionaliste fourbit déjà ses armes en vue du vote, à l'hiver 2012.

Des concessions lui ont pourtant été offertes. La résolution prévoit que les diocèses devront consentir des arrangements aux anglicans qui refusent d'être gouvernés par une femme.

Ce compromis ne va pas assez loin aux yeux de l'évêque de Fulham, John Broadhurst, pour qui l'ordination des femmes va à l'encontre de leur nature et de la volonté de Dieu. Il prédit beaucoup de départs de l'Église, comme ce fut le cas quand on a commencé à ordonner des femmes, en 1994.

«Mon organisation compte un millier de prêtres, et aucun d'eux n'est content, a-t-il déclaré à la BBC. Ils doivent maintenant décider s'ils plieront l'échine, se rebelleront ou partiront.»

Ces menaces de défection n'intimident pas les groupes féministes. «Cette majorité écrasante nous donne des munitions pour faire campagne auprès des diocèses, a affirmé Rachel Weir, porte-parole de Women and the Church. Le compromis proposé a d'excellentes chances de devenir loi.»

Crise et conversion

Quoi qu'il en soit, l'archevêque de Canterbury, Rowan Williams, fait face à une crise de plus. L'homme aux sourcils broussailleux ne cache plus qu'il trouve «désespérément difficile» de préserver l'unité de ses membres.

L'Église est en effet déchirée par les dissensions.

La semaine dernière, Jeffrey John, pasteur ouvertement gai et en couple avec un autre ecclésiastique, a été écarté du poste d'évêque du diocèse londonien de Southwark. Ayant eu vent de sa nomination, les conservateurs ont fait échouer sa candidature.

Ces divisions font le jeu de l'Église catholique. En octobre 2009, le pape Benoît XVI a mis sur pied une structure destinée à faciliter la conversion des anglicans. Le Vatican avait expliqué qu'il répondait aux «appels répétés et insistants» d'ecclésiastiques qui veulent abjurer.

D'ailleurs, le durcissement de ton du Vatican envers l'ordination des femmes semble être une perche tendue aux anglicans traditionalistes.

En 1994, l'Église d'Angleterre avait perdu 450 prélats à la suite de l'accession des femmes à la prêtrise.