Le président français Nicolas Sarkozy a cherché à allier apaisement et fermeté mercredi, plaidant pour la «pédagogie» dans le dossier de l'insécurité mais maintenant les expulsions de Roms malgré les critiques internationales et la tempête politique.

Les responsables français ont baissé d'un ton leur rhétorique sur l'immigration et l'insécurité avant de recevoir mercredi et jeudi à Paris le secrétaire d'État roumain chargé des Roms, Valentin Mocanu, et celui chargé de la Sécurité publique, Dan Valentin Fatuloiu.

Lors du Conseil des ministres de rentrée, Nicolas Sarkozy a demandé mercredi à ses ministres de «redoubler de dialogue, de pédagogie face aux inquiétudes et interrogations» et de «redoubler de courage» face «aux critiques souvent excessives et infondées» sur les expulsions de Roms vers la Roumanie.

«Nous ne cèderons pas à ceux qui cherchent la polémique systématique», a-t-il ajouté, cité par le porte-parole du gouvernement Luc Chatel.

La veille, le premier ministre François Fillon avait appelé à agir «sans laxisme ni excès», se démarquant des propos offensifs tenus pendant l'été par Nicolas Sarkozy et son ministre l'Intérieur Brice Hortefeux. En déclarant la «guerre» à la criminalité, ils avaient clairement ciblé les Français d'origine étrangère et les Roms.

Les deux responsables roumains, qui ont avancé de cinq jours leur visite en France, devaient rencontrer dans l'après-midi Brice Hortefeux et ses collègues chargés de l'Immigration et des Affaires européennes, Eric Besson et Pierre Lellouche.

Avant cette rencontre, Eric Besson a prévenu, dans un entretien avec l'AFP, que deux vols «spécialement affrétés» transportant des Roms partiraient jeudi, l'un de Paris (Roissy), avec 158 personnes, et l'autre de Lyon (centre-est) avec 125 personnes.

«On veut coopérer davantage avec eux», a déclaré mercredi Eric Besson, plaidant pour «une bonne intégration des Roms en Roumanie» et une meilleure utilisation des crédits européens, afin que les membres de cette communauté aient moins la tentation d'émigrer vers l'Europe de l'Ouest.

Les deux responsables roumains arrivent à Paris alors que les expulsions de Roms provoquent un débat politique extrêmement tendu.

M. Sarkozy a été critiqué par l'opposition de gauche. Mais il est aussi attaqué avec encore plus de virulence par des responsables de son camp, dont son ennemi juré, l'ex-premier ministre Dominique de Villepin. Celui-ci estime que sa politique sécuritaire est «indigne» et fait porter une «tache de honte» sur le drapeau français.

À l'étranger, le durcissement de la politique française a suscité la réprobation à l'ONU, au Conseil de l'Europe, les réserves de la Commission européenne et un rappel à l'ordre du pape Benoît XVI.

Après plusieurs faits divers médiatiques, M. Sarkozy avait annoncé le 30 juillet que les camps illégaux de Roms seraient démantelés et certains criminels d'origine étrangère déchus de leur nationalité française.

Les expulsions devant les caméras de télévision de plus de 200 Roms vers la Roumanie, la semaine dernière, ont marqué le début de la mise en oeuvre de ces mesures renforcées, qui établissent un lien entre immigration et insécurité.

Eric Besson a cependant déclaré mercredi à l'AFP que 8.313 Roumains et Bulgares avaient été renvoyés depuis le début de l'année dans leur pays.

Environ 15 000 Roms des pays de l'Est vivent en France, où ils bénéficient des règles de libre-circulation de l'Union européenne mais vivent souvent dans des campements de fortune ou des squats. Mais après trois mois passés en France, sans domicile ni sources de revenus, ils sont dans l'illégalité et deviennent expulsables.