Une chorale de médias conservateurs iraniens s'en prend à la femme du président français, Carla Bruni, la traitant de «prostituée». La cause de ce fiel? La première dame de France a défendu une Iranienne condamnée à la lapidation, un geste pourtant imité par des dizaines de vedettes internationales ainsi que par l'épouse du premier ministre canadien, Laureen Harper.

C'est le journal ultraconservateur Kayhan qui a parti le bal dans un article publié samedi et qui portait le titre «les putes françaises se joignent à la protestation des droits de l'homme».

Porte-parole du régime islamique, Kayhan dénonçait l'intervention de Mme Sarkozy, une «chanteuse dépravée» qui selon le journal aurait «brisé la famille de M. Sarkozy» afin de l'épouser. Faisant référence à des rumeurs selon lesquelles Mme Bruni aurait récemment eu une liaison extra-conjugale avec un musicien -rumeurs que Mme Bruni a démenties à maintes reprises-, Kayhan explique qu'il n'est pas étonnant qu'une femme, ayant elle-même commis l'adultère, en défende une autre.

Ces propos ont été repris hier sur le site web d'un autre organe de presse gouvernemental, Iran Newspaper on Network.

L'actrice Isabelle Adjani, amie proche de Mme Bruni, a elle aussi été qualifiée «d'actrice corrompue» par le journal Kayhan.

Les deux femmes ont publié la semaine dernière des lettres en soutien à Sakineh Mohammadi Ashtiani, une mère de deux enfants, condamnée à mort par lapidation par la justice iranienne.

«Répandre votre sang, priver vos enfants de leur mère, mais pourquoi? Parce que vous avez vécu, parce que vous avez aimé, parce que vous êtes une femme, une Iranienne? Tout en moi se refuse à l'accepter [...] Du fond de votre cellule, sachez que mon mari plaidera votre cause sans relâche et que la France ne vous abandonnera pas», a écrit Carla Bruni dans une missive destinée à la condamnée à mort.

Exécution en suspens

La femme de 43 ans, qui appartient à la minorité azérie du nord-est de l'Iran, est accusée d'adultère. Son exécution devait avoir lieu le mois dernier, mais a été mise en suspens par les autorités iraniennes. Cependant, les avocats chargés du dossier notent que la condamnée n'est pas tirée d'affaire et que la peine de mort est toujours effective.

Au cours des dernières semaines, 224 000 personnes dans le monde ont signé une pétition demandant la libération de Mme Ashtiani. Des centaines d'acteurs, de chanteurs, de politiciens et d'intellectuels de renom sont au compte des signataires. C'est notamment le cas de la femme de Stephen Harper, Laureen. Hier, l'attaché de presse du premier ministre canadien décriait les attaques dirigées contre Mme Sarkozy. «Le gouvernement iranien est clairement mal à l'aise avec le fait que la communauté internationale dénonce cette exécution», a dit Dimitri Soudas à La Presse.

***

Attaque la femme, cibler le mari

Depuis samedi, c'est la réputation de Carla Bruni qui est traînée dans la boue par les médias iraniens, mais selon un expert de la politique de la République islamique, c'est son mari, Nicolas Sarkozy, qui est la véritable cible de l'attaque. «M. Sarkozy a dit sur la place publique qu'il faut être plus dur avec l'Iran et qu'une guerre est envisageable. Le régime iranien l'a mal pris et réagit avec amertume et haine», explique Houchang Hassan-Yari, professeur au Collège militaire royal du Canada ajoutant qu'afin de ne pas répondre aux questions posées sur la lapidation, le régime islamique tente de discréditer la source de la critique aux yeux de l'électorat iranien.