La mort de la princesse Diana, la paix en Irlande du Nord, son amitié avec George Bush, et bien sûr, l'Irak. Les mémoires de Tony Blair, publiées hier, ont été disséquées par les médias britanniques. Pas de doute: l'ancien premier ministre continue de fasciner au royaume, ne serait-ce que pour son absence de contrition face à l'Irak.



Le regard bleu acier et perçant de Tony Blair tapisse les vitrines des librairies de Londres depuis hier. À Waterstone's, près de Piccadilly Circus, les exemplaires de A Journey (Un voyage) s'envolaient à un rythme constant.

Il était impensable pour James Winston de rater l'événement littéraire de l'année. «Je suis un grand admirateur, dit le roux de 51 ans, qui travaille en relations publiques. J'apprécie ce qu'il a fait pour réconcilier les catholiques et les protestants en Irlande du Nord, où je suis né.»

L'accord du Vendredi saint, conclu en avril 1998, soit moins d'un an après son arrivée à Downing Street, est en effet le premier fait d'armes de Tony Blair.

Frederick Saker, qui accompagnait un acheteur du livre de 700 pages, ne cachait pas son dédain pour un homme «incapable d'admettre une erreur». Le fait que les recettes (plus de 4 millions de livres sterling) seront versées à des soldats blessés en Irak ne change rien pour lui. «C'est comme payer pour les funérailles d'un homme qu'on vient de tuer», dit M. Saker.

Diana et Bush

Sans grande surprise, Tony Blair n'exprime aucun regret pour l'invasion irakienne, si ce n'est celui de ne pas avoir prévu ses conséquences désastreuses. Il admet tout de même avoir pleuré pour les familles des combattants tombés en Irak. Des larmes de crocodile, selon Reg Keys, militant et père d'un soldat disparu.

Au sujet de son ami George W. Bush, l'ancien premier ministre assure qu'il est un homme «intègre» et qu'il ne serait jamais devenu président s'il avait été idiot. Il révèle pourtant, plus loin, que l'ancien président américain a causé en 2001 avec son homologue belge, Guy Verhofstadt, sans jamais le reconnaître.

Tony Blair avoue ne pas avoir été indifférent à la «captivante» princesse Diana, dont la mort tragique en 1997 fut un premier test pour le jeune dirigeant.

Ce qui a cependant fait couler le plus d'encre hier sont les mots durs de Tony Blair au sujet de son successeur, Gordon Brown. Il résume son caractère ainsi: «Calcul politique, oui... Intelligence émotionnelle, zéro.»

La relation entre les deux hommes était devenue si délétère qu'il a augmenté sa consommation d'alcool pour endurer la personnalité «exaspérante» de Gordon Brown, alors ministre des Finances et dauphin acrimonieux.

L'effervescence médiatique a atteint son zénith en soirée avec la diffusion d'une entrevue d'une heure à la BBC.

Homme à tout faire

Encore aujourd'hui, l'énigmatique Tony Blair, dont la fortune s'élèverait à 20 millions de livres sterling, suscite tout sauf l'indifférence.

Peut-être parce qu'il n'a jamais vraiment quitté l'actualité. Conférencier, émissaire du Quartette pour la paix au Proche-Orient, consultant de tous les sommets, créateur d'une fondation pour la foi et témoin clé de la dernière commission d'enquête sur l'Irak, l'homme de 57 ans ne cesse de faire parler de lui.

D'ailleurs, il n'était pas à Londres, hier, mais à Washington, pour la reprise des pourparlers entre Israéliens et Palestiniens.

Une séance de signature de A Journey se déroulera sous haute surveillance le 8 septembre. La maison d'édition Random House espère vendre au moins 500 000 exemplaires.

Malgré l'animosité d'une majorité d'électeurs, Tony Blair ne semble pas avoir tourné la page sur sa carrière politique. Il écrit à propos de son départ en 2007: «Je n'avais pas le choix de quitter la scène politique britannique, du moins pour le moment.»